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CONGRÈS DE VÉRONE.

devaient à jamais subsister pour en transmettre le souvenir ! Et où sont Aletua, Urso, dans lesquels les fils de Pompée furent défaits, in quibus Pompei filii debellati sunt ? on l’ignore. Strabon estropie, en l’écrivant, jusqu’au nom de Pompée. Des milliers de soldats gagnèrent au prix de leur vie les batailles d’Arbelle, de Pharsale et d’Austerlitz ; de tant de morts combien de noms reste-t-il ? Trois : Alexandre, César et Napoléon.

Ferdinand et sa famille se montrent à travers les ténèbres de ces désastres ; on y reconnaît la passion du despote et la fureur des femmes. Un tyran craintif pousse à la catastrophe et tremble quand elle est venue ; il descend de l’intrépidité de sa tête dans la lâcheté de son cœur. Il y a des monarques de faux aloi, qui sont sur le trône par méprise : la plupart des évènemens de nos jours s’expliquent par la peur ; le poltron est au fond de ces évènemens énormes, comme la momie d’un roi était au centre de la pyramide de Chéops.

Plagiaires aussi de l’empire, les Espagnols empruntèrent le nom de bataillon sacré à la retraite de Moscou, ainsi qu’ils étaient bouffonesques de la Marseillaise, des sanculotides, des propos de Marat, des diatribes du Vieux Cordelier, toujours rendant les actions plus viles, le langage plus bas. Ils ne produisaient rien, parce qu’ils n’agissaient point par l’impulsion du génie national : ils traduisaient et jouaient perpétuellement notre révolution sur le théâtre espagnol. Nos têtes sans corps et nos carcasses sans têtes, vues à distance, lorsqu’on ne pouvait plus distinguer leur horreur, offraient du moins, par l’arrangement symétrique de l’immense ossuaire, de l’effrayant et du gigantesque ; il n’en était pas ainsi dans la Péninsule, dépouillée de son caractère : les hommes de cette Péninsule avaient franchi deux de leurs siècles d’un plein saut, pour rejoindre notre histoire, d’un côté à Voltaire, de l’autre à la Convention ; mais ces siècles supprimés revenaient, reprenaient leur empire et troublaient l’ordre violemment établi. Les Espagnols étaient vraiment grands, alors que le peuple était indépendant et le roi maître, que la nation disait : Sinon, non ; que le monarque absolu signait : Moi, le roi. Les deux libertés complètes de la démocratie de tous et de la démocratie d’un seul se rencontraient sans se renverser et se parlaient leur fier langage ; spectacle qui ne s’est jamais vu que dans les Espagnes.

Après l’affaire du 7 juillet 1822, le ministère se retira ; on fit d’infructueux efforts pour retenir Martinez de la Rosa : qui chante est libre. Columelle de Cadix regretta courageusement dans ses vers la république, sous le règne de Claude. Au reste, le nom de Martinez