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DE L’ALLEMAGNE.

publique dans les états méridionaux, rappelons d’abord l’esprit et les dispositions principales des ordonnances de Francfort.

Jusqu’à ce que l’histoire soit en mesure de rapporter avec certitude ce que du reste tout esprit politique peut deviner, en attendant qu’elle fasse à chaque chancellerie la part qui lui revient dans ces résolutions décisives, il suffira de s’en tenir à ces pièces officielles qu’on dédaignerait moins si l’on savait combien il est difficile d’avoir des idées pour soi, à part celles qu’on est obligé d’avoir pour le public. Or, en lisant le protocole de cette importante séance du 28 juin 1832, tel qu’il nous est donné dans l’Annuaire historique pour cette année, l’on y trouve de graves paroles.

Le ministre d’Autriche, président de la diète, fait observer d’abord que des évènemens survenus hors de la sphère d’influence des gouvernemens de l’Allemagne, ont amené un état de choses qui constate l’approche d’une révolution inévitable, si la confédération ne tente les efforts les plus énergiques pour résister à un danger aussi redoutable qu’imminent[1]. Dans une telle situation, ce ministre et celui de Prusse déclarent qu’aux yeux de leurs cours l’expérience a prouvé que la diète manque son but principal, le maintien de la sûreté intérieure des états, et qu’on ne peut expliquer que par l’imperfection d’une législation incomplète l’état maladif de l’opinion publique qui se produisait sous une forme aussi menaçante.

Ces ministres annoncent en conséquence que dans leur opinion l’article 57 de l’acte final de Vienne, consacrant le principe de la souveraineté incommutable dans la personne des princes, alors même qu’ils auraient cru devoir revêtir leur gouvernement de formes représentatives, autorisait surabondamment la diète à prendre les mesures les plus énergiques pour protéger cette souveraineté menacée par des chambres factieuses. Ils proposent donc d’étendre les attributions politiques de la diète en consacrant les principes suivans.

1o Reconnaître la souveraineté comme reposant tout entière dans la personne des princes. Dès lors ceux-ci ne sauraient être astreints à la coopération des chambres législatives que dans certaines limites ; ils conservent toujours

  1. « Tant que la situation des esprits s’est bornée à cette agitation, qui est toujours une suite immédiate de grands évènemens qui ont lieu d’une manière inattendue dans des états voisins, sa majesté a cru pouvoir espérer avec confiance que cet état maladif de l’opinion publique céderait à l’influence que l’expérience du temps et la prépondérance de la majorité calme et bien pensante étaient appelées à exercer sur l’Allemagne. Mais la fermentation ayant atteint, dans plusieurs contrées, un degré tel qu’elle menaçait même l’existence de toute la confédération, le contact permanent où se trouvent les états d’Allemagne, l’immense quantité de feuilles et d’écrits révolutionnaires qui inondent ce pays, l’abus de la parole au sein même des chambres des états, les travaux journaliers d’une propagande qui maintenant ne rougit pas de se montrer au grand jour, et les tentatives infructueuses que faisait chaque gouvernement en particulier pour sévir contre les désordres, ont donné à sa majesté impériale la triste conviction que la révolution, en Allemagne, approche à grands pas de sa maturité, et qu’elle n’a besoin, pour éclater, que d’être tolérée plus long-temps par la diète. » (Prot. de la 22e séance de la diète germanique, 28 juin 1831.)