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REVUE. — CHRONIQUE.

M. Arago, s’il voulait des chemins de fer, pencherait pour les compagnies. Il vante surtout les avantages qu’une compagnie trouverait à entreprendre le chemin de la Belgique, qu’il refuse à l’état. Une compagnie qui s’est formée n’a pu réunir que 30 millions ; une autre, patronisée par un fameux banquier, a échoué dans ses propositions de souscription. Voilà comme les compagnies répondent aux offres de la commission.

M. de Guizard a fait aussi un rapport sur le projet de loi des bâtimens civils. Il rejette presque tous les fonds demandés pour les monumens, et n’accorde que deux faibles crédits pour des augmentations de bureaux dans les ministères, et 60,000 francs pour la colonne de Boulogne, à condition de la surmonter d’une statue de Napoléon, ce qui est, en effet, très pressant. En revanche, l’allocation demandée pour l’institution des jeunes aveugles est rejetée. Le rapport de M. de Guizard remplit seize colonnes du Moniteur ; c’est aussi un monument. Malheureusement ce n’est pas un monument public, et ceux-là resteront inachevés.


— Nous nous occupons rarement de la Comédie-Française, car ses affaires nous semblent dans une situation à laquelle on n’apportera remède que lorsque ce théâtre sera retombé dans le dernier désordre. De temps à autre, il en est tiré par une œuvre de haute portée qu’il reçoit à contre-cœur, ou par un acteur de talent original qu’il abreuve de dégoûts. Puis, ce mouvement une fois donné et ses profits recueillis, la Comédie retourne bientôt au triste régime de ses sociétaires incapables et de ses directeurs impuissans. Entre autres exemples, nous remarquons que plusieurs fois on a annoncé la reprise de Chatterton ; mais la timide direction du théâtre n’ose pas se compromettre (sans y être forcée par un procès) au point de jouer, de son propre mouvement, un drame dont Paris et toute la France ont retenti, et dont l’impression se perpétue et se renouvelle à chaque représentation et à chaque lecture par l’émotion de la tragédie autant que par la gravité de la question qu’elle traite et de la plaie sociale qu’elle sonde. Rien ne nous surprend dans cet oubli calculé. Ce n’est là qu’un des traits innombrables d’impéritie qui résultent de l’état d’anarchie dans lequel se traîne ce théâtre. Il pourra être curieux d’en examiner les causes et d’en indiquer le remède.


Les Maîtres Mosaïstes et la Dernière Aldini viennent de paraître réunis en volumes. Les lecteurs de la Revue ont déjà pu apprécier la finesse et l’élévation de la pensée qui a dicté ces deux romans. Annoncer que de nouveaux suffrages ont accueilli la réimpression de ces deux derniers volumes de George Sand, est donc presque une tâche superflue. La popularité est désormais acquise à l’auteur de tant de poèmes si vrais et si charmans ; cette popularité n’est pas née d’un aveugle enthousiasme, elle est l’hommage d’une admiration clairvoyante et durable, et elle s’est établie aussi bien dans les pays étrangers qu’en France. « On a traduit, nous écrit un de nos collaborateurs, M. Marmier, qui voyage en Suède ; on a traduit