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lions, soit 25 pour cent du capital social, qui pourrait peser sur la Bourse, dans un moment décisif. Pour parer à une invasion de ce genre, invasion qui exclut la simultanéité et le concert, l’on disposerait d’un amortissement de un pour cent, et d’un capital en espèces de plus de 3 millions ; ce qui, en admettant l’emploi de la somme entière en rachats, équivaudrait à un amortissement de 18 pour cent.

En indiquant cette combinaison, nous n’avons point la prétention de trancher définitivement la difficulté. L’association des petits capitaux, et l’impulsion qui les porte vers l’industrie, sont des faits tellement récens, qu’il y aurait plus que de la témérité à déterminer, dès à présent, la place qu’ils doivent occuper dans le monde. Ce que nous avons voulu dire, c’est qu’ici comme ailleurs, la démocratie, pour durer et pour grandir, avait besoin d’une organisation ; c’est que de telles réunions de souscripteurs devaient être fortement autant que sagement gouvernées ; c’est qu’en les abandonnant à elles-mêmes, on les exposait à périr.

Comme il arrive dans toute révolution, les hommes qui ont provoqué ce mouvement ne s’étaient pas rendu compte de l’effet qu’ils allaient produire ; ils ne voulaient que réaliser le capital nécessaire à leurs entreprises, et à défaut des banquiers, ils sondaient les dispositions du public. Mais ils n’avaient deviné ni l’empressement des petits capitalistes, ni la puissance que devait révéler l’association de ces forces ignorées. Aussi, quand il faut lutter au nom des intérêts nouveaux, nous voyons sans étonnement ceux que le hasard a placés là pour les représenter, accablés du poids d’une aussi grande mission.

Il ne sera peut-être pas donné aux fondateurs de la souscription directe, en France, de recueillir le bénéfice de cette tentative hardie ; mais d’autres profiteront de leur exemple et de leurs fautes, et la voie s’élargira en s’éclairant. Il suffit que les préventions qui tenaient le public éloigné des entreprises industrielles, tendent à s’effacer. Un grand pas a été fait le jour où plusieurs milliers de souscripteurs ont adopté les fondateurs d’une entreprise, et les ont, par ce suffrage volontaire, élevés sur le pavois.


Léon Faucher.