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vert, nous devons le dire, des sources abondantes d’émotion. Que cette émotion naisse de la sympathie ou de la surprise, toujours est-il que le public a sanctionné, par ses applaudissemens, la tentative du jeune écrivain. Plusieurs scènes méritaient, en effet, les suffrages qu’elles ont obtenus. À partir du second acte, l’œuvre de M. Romand renferme des parties dignes d’éloge. Don Luis, qu’on croit le fils du duc d’Albe, est réellement le fils d’Artevelle, et n’a été élevé dans le palais du gouverneur que par suite d’une substitution. La scène où le comte de Lowendeghem révèle à don Luis sa naissance, la scène suivante, entre Lowendeghem et Artevelle, offrent des situations bien conçues et d’un grand effet. Au troisième acte, la lutte de l’amour paternel et du patriotisme dans le cœur d’Artevelle ; au quatrième, la révélation qu’il adresse à Yseult et à don Luis, accueillie par une surprise compatissante, excitent de légitimes émotions. Enfin, malgré ses longueurs, le cinquième acte, rempli par la réhabilitation et le martyre d’Artevelle, termine dignement la pièce. L’interprétation des acteurs a été à la hauteur des qualités comme des défauts de cet ouvrage, où, en dépit de l’exagération et de l’invraisemblance, les traces d’un travail consciencieux, d’un talent véritable, se découvrent. Nous ne chicanerons pas M. Romand sur la fausseté historique de son œuvre ; il n’a évidemment, pour mettre en scène Guillaume de Nassau, le duc d’Albe, d’Egmont, Artevelle, consulté que sa fantaisie. C’est pour cela aussi que nous nous abstiendrons de lui reprocher de n’avoir assigné, dans son drame, qu’un rang secondaire aux haines religieuses.


— Une publication d’un haut intérêt sort en ce moment des presses de l’imprimerie royale ; elle a pour titre : Théâtre chinois, ou Choix des pièces de théâtre composées sous les empereurs mongoles. Le traducteur est M. Bazin, qui a fait ses preuves dans le Journal Asiatique, où il a inséré une piquante comédie chinoise : les Intrigues d’une Soubrette. Nous consacrerons un article au Théâtre chinois de M. Bazin.


— Le livre de notre collaborateur M. L. de Carné, des Intérêts nouveaux en Europe depuis la révolution de 1830, a paru ces derniers jours. Nous reparlerons de cette importante publication.


— Le cours de M. Sainte-Beuve à l’académie de Lausanne est entièrement achevé, et a obtenu tout le succès qu’on pouvait lui prédire. Nous comptons consacrer quelques lignes à l’exposition du sujet traité par M. Sainte-Beuve, et nous sommes heureux d’annoncer à nos lecteurs le retour d’un collaborateur dont les travaux nous sont aussi précieux que son amitié nous est chère.


F. Buloz.