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INSTITUTIONS FINANCIÈRES.

culation, et en abaissant le taux de l’intérêt. Il règlera cette même production, en la renfermant dans les limites des valeurs réelles existantes, dont l’effet circulant n’est, pour ainsi dire, que le signe monétaire : tandis qu’aujourd’hui, d’une part, les capitaux circulent, comme nous l’avons montré, en quantité moindre, et, d’une autre part, sont représentés par un papier dépourvu en partie d’hypothèque réelle, et, dans tous les cas, incertaine, ce qui rend les opérations où on les emploie incertaines au même degré, par la difficulté, entre autres, d’établir un rapport exact entre la vente possible et la production.

Une seconde conséquence du système général de crédit sera d’aider beaucoup à la solution du grand problème de la distribution de la richesse ; car, en augmentant indéfiniment la masse des valeurs circulantes, en infiltrant, pour parler ainsi, par leur subdivision, les capitaux dans toutes les veines du corps social, il les fera parvenir jusqu’à ceux auxquels ils ne sont point accessibles présentement, et cela de deux manières. Tout ce qui représente une valeur réelle pouvant devenir une hypothèque acceptable dans ce système de crédit, un nombre considérable de travailleurs, réduits maintenant à vendre leur travail aux capitalistes, obtenant, pour un faible intérêt, les capitaux qui leur manquent, retireront pour eux-mêmes de ce travail les bénéfices que d’autres en recueillent dans l’état actuel du crédit, d’où il résultera que la richesse oscillera entre deux points plus rapprochés, ou, en d’autres termes, que le travail ayant une part plus grande dans les produits du travail même, le contraste affligeant et dangereux de l’opulence excessive et de l’excessive misère diminuera progressivement.

On conçoit même qu’on en viendra, par un développement naturel et prochain, à accepter, en certains cas, comme les banques d’Écosse, le travail pour hypothèque d’un capital ou d’un crédit déterminé, ou à combiner, dans la pratique, les garanties morales avec les garanties matérielles, sauf à compenser les risques éventuels par un intérêt plus élevé, ou par une sorte de prime d’assurance. On sera même infailliblement conduit là par le mouvement naturel des choses ; car, au fond, le travail uni à la probité forme, à tout prendre, une garantie souvent plus solide qu’une foule de gages matériels, ou douteux en soi, ou que mille circonstances peuvent détruire entre les mains des dépositaires. On voit d’ailleurs combien cette direction donnée au crédit contribuerait, par l’intérêt même, à la réforme morale des hommes de travail.