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Page:Revue des Deux Mondes - 1838 - tome 15.djvu/788

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REVUE DES DEUX MONDES.

tement défaits. Le 11 octobre, c’est-à-dire trois jours après ce combat, le séraskier reçut la nouvelle de la paix et demanda une suspension d’armes. Bientôt le traité d’Andrinople fut connu, les hostilités cessèrent, et Paskewitch fit évacuer successivement les pachaliks restitués à la Porte. Aussitôt après la conclusion de la paix, Diebitch avait envoyé deux courriers à Paskewitch, l’un par terre, l’autre par mer. Celui-ci était arrivé, le 2 octobre, en rade de Trébizonde ; mais les Turcs ne lui permirent pas de débarquer, et il fut forcé de lever l’ancre pour aller chercher un autre port. Cela fut cause que le sanglant combat de Baïbourt fut livré en pleine paix.

Le quatrième article du traité d’Andrinople détermina les frontières entre la Russie et la Turquie d’Asie. On y expose d’abord combien il est nécessaire d’établir entre les deux états des limites clairement tracées et de prendre en même temps tous les moyens possibles pour faire cesser les brigandages qui ont si souvent troublé les rapports d’amitié et de bon voisinage des hautes parties contractantes ; puis on stipule qu’on établira comme frontière la ligne qui, suivant les limites actuelles de la Gourie, monte de la mer Noire à la frontière de l’Imérétie, et s’en va tout droit joindre le point de contact des pachaliks d’Akhaltzikhé et de Kars avec la Géorgie : la ville d’Akhaltzikhé et le fort d’Akhalkalaki sont au nord et en dedans de cette ligne.

Voilà, avec les forteresses de Poti et d’Anapa, tout ce que se fit donner la Russie. « Le coin de terre cédé par la Turquie, dit M. Eichwald, est en partie désert, tout coupé de montagnes et de rochers. Sa population est très faible et sa richesse presque nulle ; mais il protége tout l’ouest de la Géorgie et les nouvelles acquisitions faites sur la Perse, et sa possession est très importante pour la Russie, parce que les Turcs, postés sur ces hauteurs inaccessibles, avaient toute facilité pour inquiéter ses provinces du Caucase. La Russie, en exigeant cette cession de territoire, avait donc un but légitime. Le pachalik d’Akhaltzikhé, ainsi que celui d’Erzeroum, appartenaient autrefois au royaume d’Arménie, et sont encore habités, en grande partie, par des Arméniens. La Russie a rendu l’importante place d’Erzeroum, parce que, si elle l’avait gardée, elle se serait trouvée en possession des montagnes qui commandent la Turquie d’Asie, de même qu’elle a en son pouvoir celles qui dominent la Perse, et cette position lui aurait livré les clés des deux empires ; mais alors la Turquie serait un pays ouvert, sans force, livré de tous côtés à ses ennemis, et où les Russes particulièrement pourraient entrer, sans coup férir, quand ils le voudraient. La Russie n’a donc pas voulu, par ces acquisitions, pousser à la chute de l’empire ottoman,