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les chartes de ses prédécesseurs. Sous son règne glorieux, la liberté anglaise fit d’importantes conquêtes. Le droit des lords à n’être jugés qu’en parlement fut solennellement reconnu, et le procès de Latimer consacra le principe de la responsabilité ministérielle. Les cas de haute trahison furent rigoureusement définis, et l’autorité royale dut accepter de la jalouse inquiétude de ses barons des barrières que son épée victorieuse n’essaya pas de renverser.

En lisant avec attention les annales de ce long règne, on voit s’y dessiner déjà les deux doctrines politiques destinées à s’élever un jour l’une contre l’autre. D’une part, les droits du parlement sont mieux définis, et ses prétentions s’étendent ; d’une autre, le monarque réclame, en invoquant la gravité des circonstances, le droit de lever des taxes sans l’assentiment préalable de ses sujets, et s’efforce d’opposer ses proclamations délibérées en conseil privé aux lois faites en parlement avec le concours des lords et des communes : long et redoutable conflit qui devait plus tard faire élever l’échafaud de Charles Ier, pour ne finir que deux règnes après lui par l’exil définitif de sa race.

Sous Richard II, les deux chambres procèdent au détrônement légal d’un prince, premier martyr de la royauté parlementaire. Menacé par d’impitoyables factieux, voyant l’exil atteindre ses amis, la mort planer sur ses conseillers, cet infortuné monarque tente, pour résister aux violences d’une aristocratie factieuse, de s’appuyer sur les légistes, qui, dès cette époque, commencent à grandir en importance et en crédit. Les tendances de ceux-ci vers le pouvoir absolu, tendances qui, un siècle plus tard, se révélèrent dans toute leur énergie en Angleterre comme dans le reste de l’Europe, se manifestent alors d’une manière non équivoque. Le roi proclame le dogme de sa suprématie, auquel le parlement répond par un arrêt de déchéance, et le drame mystérieux du château de Pomfret prépare, à plus de deux siècles de distance, le meurtre juridique de White-Hall.

Sous Henri IV, élevé au trône par les deux chambres, celles-ci étendent leurs prérogatives, et font impérieusement, du redressement des griefs signalés par elles, la condition préalable de tout octroi de subsides. Elles surveillent avec une incessante jalousie la conduite du roi qu’elles se sont donné ; et, à leur attitude en face du trône, au ton même de leurs harangues, on sent que cette royauté est d’hier, que son titre est douteux et son avenir incertain.

À cette époque, le rôle des communes, au sein du parlement, est