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SPIRIDION.

À M. PIERRE LEROUX.
Ami et frère par les années, père et maître par la vertu et la science, agréez l’envoi d’un de mes contes, non comme un travail digne de vous être dédié, mais comme un témoignage d’amitié et de vénération.
George Sand.

PREMIÈRE PARTIE.

Lorsque j’entrai comme novice au couvent des Franciscains, j’étais à peine âgé de seize ans. Mon caractère, doux et timide, sembla inspirer d’abord la confiance et l’affection, mais je ne tardai pas à voir la bienveillance des frères se changer en froideur, et le père trésorier, qui seul me conserva un peu d’intérêt, me prit plusieurs fois à part pour me dire tout bas que si je ne faisais attention à moi-même, je tomberais dans la disgrace du prieur. Je le pressais en vain de s’expliquer, il mettait un doigt sur ses lèvres, et s’éloignant d’un air mystérieux, il ajoutait pour toute réponse : — Vous savez bien, mon cher fils, ce que je veux dire. Je cherchais vainement mon crime. Il m’était impossible, après le plus scrupuleux examen, de découvrir en moi des torts assez graves