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jaillir, comme Moïse, un torrent d’eau pure ; là le passage qu’il se fraya entre un rempart de montagnes ; plus loin les figures des sorciers qu’il a changés en pierres. À quelque distance de Drivstuen, en allant à Riisa, on aperçoit à droite, au bord de la route, une grande masse de rocs taillés à pic, et terminés par une espèce de terrasse qui s’élève à plus de cent pieds au-dessus du sol. Un jour que je passais là, le guide me dit : « Voyez, voilà le rocher d’où saint Olaf s’élança pour échapper au diable qui le poursuivait, et cette entaille que vous remarquez sur la pierre est l’empreinte du pied de son cheval. » Dans le Romsdal, on montre sur la cime d’une montagne une ouverture pareille à la brèche de Roland dans les Pyrénées, et les paysans racontent que saint Olaf a fendu cette montagne avec son épée. Quand on parle de l’église de Saint-Clément, qu’il fit bâtir à Nidaros, on raconte une légende pareille à celle qui existe sur la cathédrale de Lund. Un Trolle s’était engagé à construire tout l’édifice à condition que saint Olaf lui donnerait le soleil et la lune, s’il ne parvenait pas à savoir son nom ; mais lorsque l’église fut finie, le saint proclama à haute voix le nom de l’architecte ensorcelé, qui, dans son désespoir, se précipita du haut de la tour, et mourut à l’instant.

À l’endroit où le corps de saint Olaf avait été déposé, Magnus-le-Bon, son fils, qui monta après lui sur le trône de Norwége, construisit une chapelle en bois (1036) qui, en 1077, fut remplacée par une église en pierre. Vingt ans après, Harald Haardraade en bâtit une autre à peu près sur le même lieu. Il y avait ainsi, dès le XIe siècle, trois églises dans cette ville fondée à la fin du xe, dans cette capitale d’une contrée où le baptême avait été introduit par la force du glaive. Un grand nombre de pélerins se rassemblaient là chaque année ; ils venaient se mettre à genoux dans l’église de saint Olaf et déposaient de riches offrandes sur son tombeau. Les bords du Nid, où l’on n’entendait retentir autrefois que le cri des matelots et le chant de guerre des pirates, répétèrent l’hymne des fêtes religieuses et les prières du cloître. Cette ville, qui n’avait été qu’une résidence de prince et un camp de soldats, devint la métropole de l’Évangile, le boulevart du christianisme dans le Nord. En l’année 1030, elle avait déjà un évêque, et, en 1152, l’évêque fut nommé archevêque, primat de Norwége et légat du saint-siége. Au commencement du XIVe siècle, on comptait à Nidaros deux hôpitaux, quatre couvens, et quatorze églises au milieu desquelles l’œil du voyageur distinguait de loin la magnifique flèche de la cathédrale.

Cette cathédrale, plus vaste que celles de Roeskilde et d’Upsal, fut bâtie en 1183 par l’archevêque Eystein. Une partie de l’ancienne église de Harald forma l’une des ailes du nouvel édifice ; le chœur et la nef furent construits sur un autre plan. Quand on y entre, c’est une chose curieuse que d’observer, dans la même enceinte, à quelques pas de distance, deux époques d’art si voisines et déjà si différentes l’une de l’autre, deux styles d’architecture qu’un siècle sépare et qui ne se ressemblent plus. L’église, avec ses deux ailes placées symétriquement de chaque côté, a la forme d’une croix ; l’aile droite, con-