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lendemain au lever du jour ; si Dieu et ses saints leur inspiraient alors la pensée de marcher à l’ennemi, ils se mettraient tous sous la protection des légions célestes et s’en iraient hors des murs de Palerme, pour sauver la cité en péril ou mourir en héros !

Le lendemain, le vieux prince fut exact au rendez-vous. Il arriva sur la place dès l’aurore. Il était en habit de guerre du temps passé, et soutenait ses jambes goutteuses à l’aide d’un long sabre. Le peuple fut également exact à l’heure ; mais il vint désarmé, et des cris de paix sortaient de toutes les bouches. C’est ce que le prince avait prévu ; il fut nommé négociateur par acclamations, et partit aussitôt pour le camp du général Pépé, avec un avocat et un colonel qu’on lui avait adjoints.

On s’entendit bientôt, et les conditions du traité furent toutes à l’avantage de la Sicile. On accorda aux députés de Palerme le droit de décider en parlement, à la majorité des voix, de la réunion ou de la séparation de Naples et de la Sicile ; on leur accorda la constitution espagnole, le droit de gouverner Palerme par une junte prise au sein de ses habitans, amnistie pour les délits de la révolution, liberté des opinions, oubli, clémence, liberté ; bref on passa par toutes les clauses qui furent proposées, et on n’en imposa qu’une seule : l’entrée des troupes napolitaines dans Palerme, dernier article à l’aide duquel on était sûr de réduire tous les autres au néant.

Le salut de la noblesse palermitaine était dans cette clause du traité, et l’habile prince de Paterne rentra lui-même à la tête des bataillons napolitains, faisant des signes de victoire et des gestes populaires pour montrer au peuple la faiblesse des napolitains, se moquant ainsi à la fois des vainqueurs et des vaincus. Il y avait quatre-vingts jours que la populace régnait à Palerme. En se rendant aux troupes napolitaines, la noblesse sicilienne ne fit que changer de joug. Dans ma prochaine lettre, je vous montrerai que la révolution de Catane, qui finissait à peine quand j’arrivai dans cette ville, il y a un an, a suivi exactement, mais avec plus de rapidité, toutes les phases de la révolution de Palerme en 1820. C’est que les mêmes causes produisent généralement les mêmes effets.

Je vous ai dit aussi que l’autorité du gouvernement napolitain en Sicile s’appuie encore, en fait de divisions, sur l’éloignement qu’éprouvent les Siciliens contre ceux des leurs qui exercent des emplois conférés par la cour de Naples. Je citerai, entre autres exemples, celui du dernier vice-roi, le prince de Campo-Franco, dont les excel-