mestique, incontestable propriété du maître ; on a disputé seulement sur la question de savoir s’ils appartiennent à l’usufruitier. Il est vrai encore que, malgré la loi qui ne reconnaît à l’esclave aucune propriété, le maître tolère qu’après bien des veilles, bien des jeûnes volontaires, bien des labeurs ajoutés aux labeurs de la maison, il garde quelque chose de l’argent qui paie son industrie ; qu’il ait une sorte de propriété illégale ; qu’il en dispose même par un quasi-testament, toujours sous l’approbation et le veto sans appel de son maître. En six ans, s’il est laborieux et sobre, et toujours si le maître le veut bien, il peut se racheter. — Mais il faudra qu’il souffre et travaille, qu’au besoin il demande au vol et à la débauche l’argent que l’industrie ne lui donne pas. Il faudra qu’il renonce à sa seule consolation, aux joies de la popina, où, pendant que le maître prend part à un festin, ses esclaves l’attendent, jouent aux dés, médisent de lui, soupent pour deux as. Il faudra encore que, sur ce mince pécule, la future générosité de son maître s’achète par des présens, présens pour le jour de sa naissance, présens pour le mariage de son fils, présens pour les couches de sa fille. Après tout cela, pourvu que dans l’intervalle son maître ne l’ait pas vendu, gardant le pécule qui de droit lui appartient ; pourvu que quelque clause de son achat ou du testament qui l’a légué n’interdise pas l’affranchissement ; si son maître tient parole ; si enfin les lois contre les affranchissemens, « lois méchantes et jalouses[1], » ne parviennent pas à l’empêcher, il sera libre. Cette attente lui paraîtra-t-elle trop longue ? prendra-t-il la fuite ? Tout est en éveil pour l’atteindre : reprendre le fugitif est une affaire d’état. Toute la civilisation va lui courir sus. Des fugitivaires, dont c’est le métier, l’auront bientôt ramené à son maître, et la lettre F, marquée sur son front avec un fer rouge, avertira qu’on prenne garde à lui.
Quant au terme probable de sa vie, le vivier de Crassus, qui engraisse ses murènes d’hommes vivans, ou celui de Vedius Pollion, qui leur jette un esclave pour avoir cassé une coupe de cristal ; les infâmes croix, toujours debout et les corps abandonnés auprès de la porte Esquiline, l’avertissent sérieusement de ne pas offenser l’omnipotence du maître. Si on le laisse vieillir, je vous ai dit cette île du Tibre, où l’on abandonnait à la grace d’Esculape les esclaves ma-
- ↑ Libertates impedientem et quodam modo invidam. (Jastinian. Institut.)
même si d’un attelage on a tué une mule, ou d’un quadrige un cheval. — 213. Celui dont l’esclave a été tué a le choix ou de poursuivre par la voie criminelle, ou de réclamer une indemnité en vertu de la loi Aquilia. (Caii institut., III.)