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Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 18.djvu/648

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kiades, les lamies, et tous ces fantômes venus de Thrace, et qui erraient depuis des siècles au nord-ouest de la Thessalie et de Lemnos, sans que nul eût osé les recueillir ; le romantisme enfin de l’antiquité classique. Je laisse à penser au lecteur si Méphistophélès se trouve bien en pareille compagnie. Il interroge çà et là, il cause, il argumente, et, sauf quelques expressions qui l’embarrassent un peu, finit par se dire que tout cela se ressemble beaucoup et qu’il n’y a guère que les noms de changés. Un moment il est là comme sur sa terre, il donne la main à chacun, et se croirait volontiers dans son royaume, parmi ses familiers et ses sujets. Le vieux diable a trop d’esprit et de sens pour se laisser prendre aux différences. Aussi ne tarde-t-il pas à s’apercevoir que tout cet appareil dont il se faisait un monstre, c’est tout simplement l’éternelle émanation de la grande nature, modifiée à l’infini par des conditions de climat, de temps et de langage. Insensiblement il marche avec plus d’aisance, prend pied sur cette Grèce, et au besoin il s’arrangerait pour y vivre. La Thessalie vaut le Brocken ; entre la pythie de Délos et la sorcière du Harzberg, ce n’est guère qu’une question de monture, un trépied au lieu d’un balai ; voilà tout.

Faust rencontre Chiron sur le rivage du Peneïos, et lui demande aussitôt des nouvelles d’Hélène. Le centaure, haletant, l’invite à monter sur son dos, et l’emporte à travers le fleuve, « du côté de la plaine où Rome et la Grèce se heurtèrent en un choc terrible, » le champ de Cynocéphale où Quintus Flaminius battit Philippe. Chemin faisant, le fils de Kronos et de Philyra cause avec son cavalier et lui parle d’Hercule, son élève, avec enthousiasme.


Chiron. — Un royal jeune homme, harmonieux à voir, soumis à ses frères aînés, soumis aussi aux tout aimables femmes ! son pareil, Gea ne l’enfantera

    éveillent toujours l’idée de l’antiquité la plus reculée. Les kabires avaient à Memphis un temple et des statues que les prêtres seuls visitaient ; ce fut sur ces images de formes grotesques que Cambyse accomplit, lors de sa conquête de l’Égypte, le fameux sacrilége dont parle Hérodote, liv. III, pag. 37. Les kabires étaient surtout fêtés en Samothrace, où se célébraient des orgies et des bacchanales en leur honneur. Hérodote fait venir ce culte des Pélasges. C’est d’ailleurs toujours le dogme de la fécondation de la terre et du principe génératif dans la nature. Une tragédie d’Eschyle, dont quelques vers seulement sont venus jusqu’à nous, était intitulée les Kabires. On confond souvent les kabires avec les telchines, les curètes, les coribantes, et surtout avec les dactyles du mont Ida. L’antiquité représente les kabires sous la forme de nains à gros ventre, de cruches, etc. (Voyez la Symbolique de Creuzer.)