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REVUE DES DEUX MONDES.

ASTOLPHE.

Vous voulez que je vous le dise ? Eh bien ! je vous le dirai pour faire cesser vos regrets et pour vous montrer entre quelles mains vous aviez remis les rênes de votre volonté et les secrets de votre ame. Ce cordelier poursuivait ma femme de ses ignobles supplications.

SETTIMIA.

Votre femme est une impie. Il voulait la ramener au devoir, et c’est moi qui l’avais invité à le faire.

ASTOLPHE.

Ô ma mère ! vous ne comprenez pas, vous ne pouvez pas comprendre… votre ame pure se refuse à de pareils soupçons !… Ce misérable brûlait pour Gabrielle de honteux désirs, et il avait osé le lui dire.

SETTIMIA.

Gabrielle a dit cela ? Eh bien ! c’est une calomnie. Une pareille chose est impossible. Je n’y crois pas, je n’y croirai jamais.

ASTOLPHE.

Une calomnie de la part de Gabrielle ? Vous ne pensez pas ce que vous dites, ma mère !

SETTIMIA.

Je le pense ! je le pense si bien, que je veux la confondre en présence du frère Côme.

ASTOLPHE.

Vous ne feriez pas une pareille chose, ma mère ! non, vous ne le feriez pas !

SETTIMIA.

Je le ferai ! Nous verrons si elle soutiendra son imposture en face de ce saint homme et en ma présence.

ASTOLPHE.

Son imposture ? Est-ce un mauvais rêve que je fais ? Est-ce de Gabrielle que ma mère parle ainsi ? Que se passe-t-il donc dans le sein de cette famille où j’étais revenu, plein de confiance et de piété, chercher l’estime et le bonheur ?

SETTIMIA.

Le bonheur ! Pour le goûter, il faut le donner aux autres, et vous et votre femme ne faites que m’abreuver de chagrins.

ASTOLPHE.

Moi ! Si vous m’accusez, ma mère, je ne puis que baisser la tête et pleurer, quoique en vérité je ne me sente pas coupable ; mais Ga-