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GABRIEL.

retrouvé bientôt, est dans l’intention de vous citer comme assassin devant le conseil des huit.

ASTOLPHE.

Cette menace serait pour moi une preuve certaine que Gabrielle est en son pouvoir. Le lâche !

LE PRÉCEPTEUR.

J’ai des craintes encore plus graves…

ASTOLPHE.

Ne me les dites pas ; je suis assez découragé, depuis trois mois que je la cherche en vain.

LE PRÉCEPTEUR.

La cherchez-vous bien consciencieusement, mon cher seigneur Astolphe ?

ASTOLPHE, avec amertume.

Vous en doutez ?

LE PRÉCEPTEUR.

Hélas ! je vous rencontre en masque, courant le carnaval, comme si vous pouviez prendre quelque amusement…

ASTOLPHE.

Vous autres instituteurs d’enfans, vous commencez toujours par le blâme avant de réfléchir. Ne vous serait-il pas plus naturel de penser que j’ai pris un masque et que je cours toute la ville pour chercher plus à l’aise sans qu’on se défie de moi ? Le carnaval fut toujours une circonstance favorable aux amans, aux jaloux et aux voleurs.

LE PRÉCEPTEUR.

Ouvrez-moi votre ame toute entière, seigneur Astolphe. Gabrielle vous est-elle aussi chère que dans les premiers temps de votre union ?

ASTOLPHE.

Mon Dieu ! qu’ai-je donc fait pour qu’on en doute ? Vous voulez donc ajouter à mes chagrins ?

LE PRÉCEPTEUR.

Dieu m’en préserve ! mais il m’a semblé, dans nos fréquens entretiens, qu’il se mêlait à votre affection pour elle des pensées d’une autre nature.

ASTOLPHE.

Lesquelles, selon vous ?

LE PRÉCEPTEUR.

Ne vous irritez pas contre moi ; je suis résolu à tout faire pour vous, vous le savez, mais je ne puis vous prêter mon ministère ecclé-