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Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 20.djvu/378

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REVUE DES DEUX MONDES.

demande si à ces degrés divers de l’échelle administrative ne correspondent pas et les choix les plus naturels, et les influences relatives telles qu’elles résultent de la moralité, de la fortune, des lumières et du dévouement aux intérêts publics ; qu’il dise si une telle base, admise pour l’électorat politique, donnerait autant au hasard et à l’intrigue que des noms réunis sur des listes sans cohésion et sans lien ? Ne serait-il pas rationnel et moral de voir les corps électifs s’engendrer, pour ainsi dire, l’un l’autre, se supporter comme des étages d’un même édifice, au lieu de rester dans leur isolement et leurs précipitations, appuyés sur des échafaudages d’emprunt ? D’après notre loi départementale, il suffit de cinquante électeurs portés sur une liste cantonale, pour nommer les membres des conseils d’arrondissement et ceux des conseils généraux. Pensez-vous, monsieur, qu’il ne fût pas plus libéral, en même temps que plus rationnel, de les faire élire par les conseillers municipaux, déjà consacrés par l’élection populaire ? Ces notables des communes, réunis en assemblée électorale, ne seraient-ils pas mieux placés que tous autres, pour discerner les capacités d’arrondissement et de département, et ne serait-ce pas là une attribution qu’on aurait la certitude de voir sagement exercée ? y aurait-il enfin un corps plus en mesure de conférer, en pleine connaissance de cause et dans toute son indépendance, un haut mandat politique qu’un collège formé par les membres d’un conseil-général, unis à ceux des conseils d’arrondissement ? Si l’on objectait le nombre trop restreint des électeurs, ne pourrait-on l’augmenter, en vertu du même principe, par l’adjonction de certaines catégories d’influences constatées, soit par une élection antérieure, soit par une position gouvernementale ? Ne pensez-vous pas qu’ainsi se révéleraient les forces véritables du pays dans des corps au sein desquels l’intelligence et la pratique des affaires seraient éprouvées par une expérience presque quotidienne ? croyez vous que la passion d’un jour prévalût facilement contre les intérêts permanens, là où le droit électoral deviendrait une attribution de plus ajoutée à tant d’autres attributions existantes ?

Si l’on admet, selon la belle théorie représentative française, qu’en approchant de l’urne électorale, chacun doit être en mesure de se rendre pleinement compte de l’acte qu’il consomme, il semble que l’élection ne peut être que graduelle, et que le droit doit se fonder sur une série d’épreuves successives. Or, si jamais les évènemens nous rappelaient à la rigueur de ce principe, je n’hésite pas à dire que la superposition des corps électifs se produisant l’un l’au-