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motif, l’ordre du manuscrit, et de commencer par les comédies, qui forment évidemment un second recueil postérieur aux poésies sacrées. Le volume se termine, comme le manuscrit, par le Panégyrique des Othons ; ce poème paraît être placé ainsi dans son ordre chronologique. En effet, l’auteur montre dans la préface de cet ouvrage beaucoup moins de timidité et de défiance en ses talens que dans la préface de ses comédies, et surtout que dans celle de ses poésies mêlées. Le Panégyrique des Othons n’a été, comme l’avoue l’auteur, composé sur aucun document écrit, mais sur des rapports oraux et pour ainsi dire confidentiels ; ce sont, en quelque sorte, des Mémoires de la famille ducale et impériale de Saxe. Bien que les troubles excités par la révolte de Henri, duc de Bavière, surnommé Rixosus, père de l’abbesse Gerberge II, contre son frère Othon Ier, soient fort atténués par la plume officieuse de Hrosvita, ce poème n’en offre pas moins un tableau intéressant et véridique des intrigues intérieures qui agitèrent alors la maison impériale[1].

Quoique j’aie hâte de parler du théâtre de Hrosvita, je ne puis cependant m’empêcher de dire quelques mots des poésies par lesquelles elle a préludé. Le premier recueil se compose des huit pièces dont les titres suivent : 1o Histoire de l’immaculée Vierge Marie, mère de Dieu, tirée du protévangile de saint Jacques, frère de Jésus[2] ; huit cent cinquante-neuf vers hexamètres léonins[3]. 2o Histoire de l’ascension de notre Seigneur. Cette pièce, composée de cent cinquante vers hexamètres, a été faite sur une traduction du grec en latin due à Jean l’évêque. 3o La Passion de saint Gandolfe, martyr ; cinq cent soixante-quatre vers élégiaques. L’auteur a employé ici un mètre moins grave que dans les pièces qui précèdent et qui suivent, sans doute parce que le sujet est, comme on va le voir, plutôt comique qu’héroïque. Gandolfe, qui vivait au milieu du VIIIe siècle, sortait de la tige royale des Burgondes. La sainteté de ce jeune prince était si

    notice intéressante sur la vie et les ouvrages de cette femme célèbre (De Hrosvita poetria et comœdia Abraham inscripta, Vratislaviae, 1839, in-8o), aurait rendu un plus grand service aux lettres, s’il eût collationné le texte d’Abraham sur le manuscrit de Munich.

  1. Ce poème a été plusieurs fois réimprimé depuis l’édition donnée par Celtes, d’abord par Justus Reuberus, dans les Scriptores rerum Germanic., pag. 161, seqq., puis par Henr. Neibomius avec les Wittechindi Annales, 1621, in-4o, et, enfin, par Henri Meibomius, neveu du précédent, dans les Script. rerum German., tom. I, pag. 709, seqq. — Il doit être prochainement réimprimé dans la collection de M. Perth.
  2. J. Alb. Fabric., Cod. apocryph. Nov. Testam., tom. I, pag. 40, seqq.
  3. Tous les vers hexamètres de Hrosvita sont dans la forme léonine.