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Page:Revue des Deux Mondes - 1839 - tome 20.djvu/469

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LA COMÉDIE AU DIXIÈME SIÈCLE.

Les disciples. — Comment cela ?

Paphnuce. — Parce qu’elle est composée tantôt de quatre, tantôt de cinq, et quelquefois de huit sons.

Les disciples. — À présent que nous savons qu’il y a trois consonnances, nous voudrions connaître leurs noms.

Paphnuce. — La première se nomme diatessaron, c’est-à-dire formée de quatre sons ; elle est en proportion épitrite ou sesquitierce (c’est-à-dire dans le rapport de 4 à 3). La seconde se nomme diapente, ou composée de cinq sons ; elle est en proportion hémiole ou sesquialtère (c’est-à-dire dans le rapport de 3 à 2). La troisième se nomme diapason ; elle se forme par doublement (c’est-à-dire par l’union de la quarte et de la quinte)[1], et se compose de huit sons.

Les disciples. — La sphère et les planètes émettent-elles donc des sons, pour qu’on puisse les comparer aux cordes ?

Paphnuce. — Sans doute, et de très forts.

Les disciples.. — Pourquoi donc ne les entendons-nous pas ?

Paphnuce. — Il y a plusieurs explications de ce phénomène. Les uns pensent qu’on ne peut entendre les sons de la sphère céleste à cause de leur durée non interrompue. Les autres croient que cela vient de la densité de l’air. Quelques-uns pensent qu’un aussi énorme volume de son ne peut pénétrer dans notre étroit conduit auditif. Quelques personnes enfin soutiennent que la sphère produit un son si doux, si enchanteur, que si les hommes pouvaient l’entendre, ils se réuniraient en foule, négligeraient toutes leurs affaires, et, s’oubliant eux-mêmes, suivraient le son conducteur de l’orient en occident.

Les disciples. — Il vaut mieux ne pas l’entendre.

Paphnuce. — La prescience du Créateur en a jugé ainsi.

Les disciples. — En voilà suffisamment sur la musique céleste ; dites-nous maintenant quelques mots de la musique humaine.

Paphnuce. — Que voulez-vous en savoir ?

Les disciples.. — En quoi consiste-t-elle ?

Paphnuce. — Elle consiste non-seulement, comme je vous l’ai dit, dans l’union du corps et de l’ame, et dans l’émission de la voix tantôt grave et tantôt aiguë ; mais on la retrouve encore dans la régulière pulsation des artères et dans la proportion de certains membres, comme dans les articulations des doigts, qui nous offrent, quand nous les mesurons, les mêmes proportions .

    définition bien plus claire en disant : « Symphonia est duarum vocum inter se junctarum dulcis concentus. » (De die natali, X, 5). Suivant Cassiodore : « Symphonia est temperamentum sonitus gravis ad acutum vel acuti ad gravem modulamen officiens. » (De Musica, pag. 430, ed. 1589). C’est en abrégeant cette dernière définition que Hrosvita a formé la sienne, aussi obscure qu’incomplète. Il est à remarquer, d’ailleurs, que le mot modulatio a chez Hrosvita une signification différente de celle que nous lui donnons aujourd’hui, et il faut le prendre ici dans le sens de Martianus Capella, qui dit : « Modulatio est soni multiplicis expressio. »

  1. Voy. Isidor. Hispal., Sententiœ de Music., ap. Gerbert., loc. cit., pag. 25. — Martian. Capell., lib. IX, § 955.