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LA
RÉPUBLIQUE D’AMALFI.

I. – LA COSTIERA ET LE GOLFE D’AMALFI.

Le petit pays d’Amalfi est l’un des plus visités et des moins connus de l’Italie. Chaque année plusieurs centaines de touristes le traversent processionnellement. Partis de quelque ville voisine, de Salerne ou de Sorrente, ils se rendent en quelques heures à Amalfi, se logent au couvent des capucins (c’est la mode), et jettent à peine un coup d’œil sur la ville, qu’ils trouvent affreuse ; les plus jeunes et les plus curieux vont faire une promenade à Atrani, et grimpent même jusqu’à Ravello, admirant pour la forme les ruines moresques de cette ville singulière ; puis nos voyageurs se rembarquent, n’ayant guère vu là, les gens du monde, que des vignes en guirlandes, des oliviers, de blanches maisons perdues dans la verdure sombre des orangers, des grenadiers et des garoubiers ; les artistes, que des paysages aux lignes grandioses. Quelques uns ont appris vaguement qu’ils parcouraient un pays jadis fameux ; mais ils ignorent que cette misérable ville d’Amalfi fut autrefois l’une des plus puissantes cités maritimes de l’Italie ; qu’elle dut au caractère aventureux, à l’admirable industrie, aux passions même de ses habitans, une splendeur qu’effacèrent seules les magnificences de Pise, de Gênes et de Venise ; qu’elle ouvrit la route de l’Orient à ces villes rivales, qu’elle eut des comptoirs dans toutes les parties du monde alors connu, qu’elle couvrit la Méditerranée de ses flottes, qu’enfin, lorsque les barbares en armes se partageaient les populations de