précier les travaux analytiques qui sont adressés à l’Institut. Sur ce point, les avis de tous les hommes compétens sont unanimes : ses amis les plus dévoués se taisent, mais n’osent pas contester la vérité du fait. Ce défaut se révèle à chaque instant de la manière la plus fâcheuse dans son cours, et surtout à l’Académie, où il lui est arrivé parfois de se tromper même dans les expressions techniques et dans les termes les plus usuels. C’est là véritablement son côté faible, et l’on conçoit combien un tel fait a de gravité pour le successeur de Fourier. Il n’y a pas un seul géomètre au monde qui ne sache au juste combien sont restreintes les connaissances mathématiques de M. Arago ; et si le public reste encore dans le doute à ce sujet, c’est qu’il s’agit de sciences difficiles et qui ne sont pas à la portée d’un nombreux auditoire. Il y a eu sans doute d’autres illustres physiciens qui n’étaient guère géomètres ; mais ceux-là avouaient leur insuffisance, et probablement ils n’auraient pas ambitionné la place de secrétaire perpétuel pour les mathématiques à l’Académie des sciences de Paris. C’est peut-être aussi pour cacher ce défaut que M. Arago, bien que doué de si heureuses facultés, a consenti à perdre la plupart de ses avantages, à se suicider pour ainsi dire aux yeux des savans, et à ne rechercher que les applaudissemens de la foule qu’elle jette toujours à ceux qui la flattent, et que par lassitude ou par caprice elle refuse un jour à ses plus chères idoles. Un homme de talent qui, au lieu de se livrer à des recherches originales, se ferait l’écho et le traducteur des idées des autres pour se rendre populaire, imiterait à son insu cet écrivain célèbre qui se fit comédien, sous prétexte qu’il voyait les acteurs toujours plus applaudis que les auteurs. Sans doute, Talma et Mlle Mars ont obtenu plus d’applaudissemens dans leur vie que n’en eurent jamais Corneille ou Racine ; mais, sans parler des couronnes qui vont chercher l’auteur sur la tête du comédien, demandez après cent ans ce que sont devenus les plus grands acteurs ? Tout meurt avec eux, tandis que la gloire de l’écrivain traverse les siècles et ne cesse jamais de grandir.
Pour vous donner une idée complète de M. Arago, il faudrait que je pusse vous le montrer aussi hors de l’Académie, car ce n’est pas là seulement qu’il cherche à exercer son influence et à faire prévaloir son opinion. M. Arago, vous le savez, est aussi un homme politique ; il est député, il est membre du conseil général de la Seine ; et mettant habilement à profit, à la chambre sa position scientifique, ailleurs son influence politique, il a su étendre partout son autorité. C’est ainsi qu’il a établi sa prépondérance à l’Observatoire