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Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 21.djvu/95

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AFFAIRES DE L’AFAGHANISTAN.

sation actuelle et des ressources du vaste empire hindo-britannique, de montrer quelle a été, dans l’ordre providentiel, la mission donnée à l’Angleterre en Asie, et d’examiner enfin comment cette mission a été remplie jusqu’à ce jour. Dans ce but et dans l’intention d’arriver, s’il se peut, à une appréciation exacte des graves évènemens dont il s’agit, il nous semble nécessaire de revenir sur l’ensemble des faits déjà connus, et de montrer leur liaison avec d’autres faits de quelque importance qui ont à peine été indiqués en France ou qui y sont entièrement ignorés. Un long séjour aux Indes anglaises nous a permis d’étudier sur les lieux le développement des forces de cet empire, la marche de sa politique, et, jusqu’à un certain point, les probabilités de son avenir. Nous nous efforcerons de jeter quelque lumière sur cette grande question, bien moins en nous livrant à nos propres conjectures qu’en offrant aux méditations des esprits sérieux les véritables données du problème. La plus importante de toutes, dans l’état présent des affaires de l’Asie, est, sans aucun doute, la conquête de l’Afghanistan. Quelques considérations générales établiront cette vérité. Nous tracerons ensuite une esquisse rapide de l’expédition, et ce coup-d’œil préliminaire une fois donné, nous entrerons dans les détails que comporte le plan que nous nous sommes tracé.

L’Afghanistan proprement dit s’étend du 61e au 70e degré de longitude est, et du 30e au 35e degré de latitude nord environ. Il est borné à l’est par la Perse, à l’ouest par l’Indus, au nord par l’Hindou-Koh (prolongement de l’Himalaya), au sud par le Balouchistan. Les deux principaux états de l’Afghanistan sont les royaumes de Kaboul et de Kandahar. Les capitales qui donnent leurs noms à ces royaumes sont les points de communication de l’Inde avec la Perse et la haute Asie. « Depuis l’antiquité la plus reculée, disait l’historien du règne d’Akbar, Aboulfazel (en 1602), Kaboul et Kandahar sont regardées comme les portes de l’Hindoustan ; l’une y donne entrée du Tourân, l’autre de l’Irân ; et, si ces places sont bien gardées, le vaste empire de l’Hindoustan est à l’abri des invasions étrangères[1].

Dans ce peu de mots révélés à l’Europe pour la première fois en 1783, sous l’administration de Warren Hastings[2], a été l’enseignement de l’Angleterre ; elle vient de prouver, quoique un peu tard, qu’il n’avait pas été perdu pour elle.

  1. Aïn-Akbery, vol. II, pag.pag. 165.
  2. Warren Hastings était gouverneur-général des Indes anglaises quand F. Gladwin entreprit la traduction de l’Aïn-Akbery. Ce fut sous le patronage de ce grand homme que l’ouvrage fut publié, et il lui fut dédié à Calcutta, le 1er sept. 1783.