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Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 21.djvu/98

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REVUE DES DEUX MONDES.

Par ce vigoureux coup de main, la suprématie politique et commerciale du gouvernement anglais et, aux yeux des peuples de l’Inde, le caractère impérial de sa domination, sont établis dans tout le nord de l’Hindoustan. Ils avaient été assurés dans l’Hindoustan central par l’extermination des Pindaries en 1817, et par la prise de Bhurtpore en 1826. Dans le sud, tout reconnaît la souveraineté absolue ou le pouvoir suzerain de la compagnie ; dans l’est et le sud est enfin, l’influence anglaise, quoique moins définitivement établie, s’est manifestée victorieusement par les traités imposés au Népal et à l’empire Birman, et ne tardera pas à se compléter. Mais n’anticipons pas sur cette partie de notre sujet.

Le dénouement de la question de l’Afghanistan a été précipité, sans aucun doute, par la tentative de la Perse contre Hérat, tentative sinon conseillée, au moins appuyée par la Russie ; mais, depuis plusieurs années, la nécessité de reculer les frontières de l’empire hindo-britannique jusqu’à l’Indus, et d’affermir l’influence anglaise à l’ouest de ce fleuve, se faisait sentir de plus en plus, et l’histoire du passé témoigne de la sollicitude inquiète avec laquelle le gouvernement suprême suivait ou cherchait à diriger la marche des évènemens dans cette partie de l’Orient. Pour bien comprendre l’œuvre lente et progressive de sa politique, il est indispensable de rappeler les principaux faits historiques qui ont préparé l’accomplissement des destinées de l’Afghanistan.

À la mort du roi de Perse, Nader-Shah, en 1747, Ahmed-Khan, l’un de ses généraux, et chef de la tribu des Abdalies (connus depuis sous le nom de Douranies), devint maître de l’Afghanistan, et se fit couronner roi à Kandahar sous le titre de Ahmed-Shah Dourdouran (la perle du siècle). Actif et habile autant que brave, Ahmed-Shah porta la terreur de ses armes de Delhi à Asterabad ; et, à sa mort, en 1773, il laissa à son fils Timour un empire dont les limites extrêmes avaient été naguère l’Oxus au nord, la mer et les embouchures de l’Indus au midi, le Kashmir et les monts Himalaya à l’est, la Perse au delà de Meshed à l’ouest[1]. Timour-Shah, loin de continuer la vie belliqueuse de son père, ne fit aucun effort pour rétablir l’autorité royale, compromise dans le Pandjab et les provinces voisines, et se contenta de régner paisiblement pendant vingt ans sur les provinces à l’ouest de l’Indus. Il mourut en 1793. Les intrigues du Zénana, appuyées

  1. Ahmed mourut à Kandahar, et cette ville est souvent nommée par les Afghans, d’après lui, Ahmed-Shâhî.