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essaya de calmer l’irritation. Santa-Anna, disait-on, était personnellement favorable aux vœux du Texas : il fallait attendre qu’il se fût prononcé, et ne prendre les armes qu’à la dernière extrémité. Mais le temps était passé où ces conseils, d’une modération timide, auraient pu arrêter l’élan des esprits, et la révolution commencée suivit son cours. Le capitaine Thompson, de la marine mexicaine, que le général Cos avait envoyé prendre connaissance de l’état des choses à Anahuac, ayant capturé dans la baie de Galveston un bâtiment qui faisait le commerce du Texas, cet acte qui menaçait des intérêts inexorables contribua encore à précipiter le soulèvement.

Stephen Austin reparut alors au milieu de ses concitoyens, et, dans une assemblée populaire tenue à Brazoria le 8 septembre, il recommanda la réunion immédiate d’une convention générale de toute la province. Le principal motif qu’il en donna fut l’imminence du renversement de la constitution fédérale au Mexique. « La nouvelle forme du gouvernement, dit-il, aura-t-elle pour effet d’annuler tous les droits du Texas et de le soumettre à un pouvoir sans limites ? S’il en doit être ainsi, le peuple du Texas peut-il adhérer au changement qui se prépare et abdiquer tout ou partie de ses prérogatives constitutionnelles ? Voilà des questions d’une importance vitale, et sur lesquelles je pense qu’il est nécessaire de consulter les citoyens. Il est vrai que Santa-Anna et d’autres personnages influens de Mexico m’ont déclaré qu’ils étaient les amis du peuple texien, qu’ils désiraient son bonheur et y travailleraient de toutes leurs forces ; que dans la nouvelle constitution de la république ils emploieraient leur influence à procurer au Texas une organisation particulière en harmonie avec ses habitudes et conforme à ses besoins. Mais c’est une raison de plus pour que les délégués du peuple se réunissent afin de déterminer les principes de cette organisation. Nous touchons au moment décisif : tout le monde comprend qu’il y a quelque chose à faire. »

Ce langage était encore modéré. Il ressemblait à celui qu’on tient toujours au commencement des révolutions, et que l’on regarderait volontiers comme une hypocrisie consacrée, s’il n’était pas naturel que les mêmes hésitations se reproduisissent constamment chez les peuples en face des mêmes dangers. Le conseil de réunir une convention ne préjugeait pas la question d’indépendance. Mais une convention, c’était un centre et une base possible d’autorité, dont l’influence ne devait pas tarder à se faire sentir, en donnant une direction commune aux efforts isolés. Sur ces entrefaites, le général Cos, qui était à Bejar, transmit au colonel Ugartechea l’ordre de se saisir, à