Page:Revue des Deux Mondes - 1840 - tome 23.djvu/178

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
174
REVUE DES DEUX MONDES.

tous ces projets. Loin de là : la même loi embrasse six projets et quatre systèmes différens ; nous ne voulons pas dire opposés ; il se peut en effet que ces systèmes divers, contraires mêmes, soient avec raison applicables à des entreprises différentes. Toujours est-il que la sincérité des débats législatifs reçoit une atteinte lorsqu’une assemblée est forcée de voter in globo des projets différens, nullement connexes, et pouvant parfaitement exister l’un sans l’autre.

Mais ce n’est pas là un expédient inventé par le ministère du 1er mars ; c’est un usage sur lequel il importe seulement d’attirer l’attention du gouvernement pour les projets futurs.

La mort de M. Daunou laisse vacante aux archives du royaume une place importante. Le bruit public a désigné plusieurs candidats. Si nous sommes bien informés, ceux sur qui l’attention paraît se fixer d’une manière particulière sont M. de Gasparin, l’ancien ministre, et M. Fauriel. M. de Gasparin est un administrateur habile, M. Fauriel, un historien dont les travaux se distinguent, entre autres, par l’exactitude et la profondeur des recherches. Selon le point de vue auquel on se place, le choix de l’un ou de l’autre ne mériterait que des éloges.

M. Vincent passe dans le conseil d’état du service extraordinaire au service ordinaire. Rien de plus naturel que de voir un administrateur aussi éclairé et d’une si grande expérience se vouer entièrement aux travaux du conseil d’état. Nous espérons qu’il sera dignement remplacé dans ses importantes fonctions au ministère du commerce.

Le public est fort préoccupé dans ce moment des nouvelles d’Alger. En admettant qu’il y ait quelque exagération, peut-être aussi un peu d’animosité dans les nouvelles qui circulent, toujours est-il que notre campagne en Afrique est longue, difficile et sans résultats décisifs qui compensent les sacrifices en hommes et en argent qu’elle exige. Il serait plus que superflu de rechercher aujourd’hui à qui l’on pourrait imputer la guerre que nous avons sur les bras, les difficultés que nous rencontrons en Afrique. Ce n’est pas le moment de discuter, mais d’agir, d’agir avec résolution et d’une manière digne de la France. Quelles qu’en soient les causes, c’est là désormais une guerre à mort avec les populations indigènes, avec les Arabes africains. C’est le mahométisme, la barbarie et le génie nomade qui veulent expulser d’Afrique la religion, la civilisation, la puissance françaises. Dans le commencement, il aurait été légitime et sensé de poser la question de savoir s’il convenait à la France, à sa politique, à son influence d’entrer dans cette voie, de jeter hors de l’Europe une partie notable de ses revenus et de ses forces, si les avantages militaires, maritimes, commerciaux qu’elle pouvait en espérer, étaient de nature à compenser ses sacrifices, si le moment était arrivé d’implanter par la force des armes, par la conquête la civilisation française sur le sol aride et malsain, sous le ciel brûlant de l’Algérie.

Aujourd’hui, empressons-nous de le reconnaître, la question ne peut être posée dans ces termes. Le drapeau français a été solennellement planté sur le sol africain. La France a dit qu’il y resterait : Abd-el-Kader veut l’en arracher de