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après avoir remis aux contrôleurs ou aux ouvreuses les contremarques prises à l’entrée[1].

D’ordinaire, quand on visite une ville à l’étranger, ce sont les églises qu’on va voir immédiatement après les théâtres. À Pompeï, ce sont aussi les temples qui ont la seconde visite. Il y en avait plusieurs dans cette petite ville. On y a retrouvé déjà, bien que le tiers à peine soit déblayé, ceux d’Esculape, de Vénus, de la Fortune, de Mercure, de Neptune ou d’Hercule, etc. On sait que les temples du paganisme étaient généralement beaucoup plus petits que nos églises, non qu’il y eût moins de dévotion, moins de devoirs religieux et de pratiques superstitieuses ; mais parce que les prêtres seuls habitaient les temples, et que les profanes restaient au dehors. Ceux de Pompeï ne démentent point cette règle ; ils sont tous fort petits, plus petits, par exemple, non-seulement que le Parthénon ou la Rotonde, mais que le temple voisin de Sérapis, dont on voit à Pozzuoli les magnifiques vestiges. Comme les théâtres ; ils sont construits d’une manière uniforme. Dans le centre, et faisant face au portique, s’élève au-dessus du sol, et presque toujours entre un cercle de colonnes, le sanctuaire destiné aux sacrifices, et qui est comme le chœur ou le maître-autel. On trouve, à côté, le cabinet pour les oracles, espèce de confessionnal où l’on venait interroger l’avenir au lieu de demander le pardon du passé. Ça et là, dans le parvis, quelques autels, de grandeur inégale, faisaient l’office des chapelles latérales de nos églises, car les prêtres du paganisme avaient aussi des sacrifices à tout prix, et mesuraient au salaire qui leur était compté les faveurs de leurs dieux. La partie la plus vaste du temple est une pièce placée derrière le sanctuaire : c’est la salle à manger, le réfectoire, où les prêtres, à la fin des offices et sans sortir du temple, mangeaient les plus délicats morceaux des agneaux ou des bœufs qu’ils avaient immolés en holocaustes. Ils accomplissaient ainsi littéralement le mot de saint Augustin : Sacerdos ut de altare vivat opportet, qui est devenu l’un de nos proverbes les plus populaires[2]. Enfin, à droite et à gauche de la salle à manger sont de petites cellules, fraîches et obscures, qui contenaient des lits de repos, où les prêtres, après leur saint repas, allaient faire la sieste, si chère aux moines qui leur ont succédé.

  1. Plusieurs de ces contremarques, qui sont des jetons de métal, portant pour empreintes des attributs de théâtre, ont été retrouvées et se conservent au musée Degli Studi.
  2. Il faut que le prêtre vive de l’autel.