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leurs contre les délits de la presse, soient préférables en elles-mêmes aux lois de censure beaucoup plus douces, il est certain que dans un état fédératif comme l’Allemagne, où chaque pays a sa constitution judiciaire et sa police particulière, elles seraient sans efficacité comme garantie pour l’ensemble. La paix et l’ordre ne peuvent être assurés, dans une semblable union que par une surveillance sur la presse, au nom de la confédération, exercée par les autorités locales, et, en cas de nécessité, par l’autorité fédérale. » L’opinion exprimée par ces paroles n’a pas cessé de régner parmi les hommes qui ont en main la direction des affaires générales de l’Allemagne : il en est résulté que la censure est devenue le régime normal de la confédération et qu’elle est considérée comme une des colonnes de l’édifice germanique. On semble croire que l’unité de l’Allemagne serait dissoute le lendemain du jour où la presse recouvrerait sa liberté, et peut-être cette crainte n’est-elle pas sans fondement ; mais qu’est-ce donc qu’une unité qui ne peut subsister qu’à de pareilles conditions ?

Il nous reste peu de chose à dire sur la période à laquelle nous sommes parvenus. La diète, outre les actes dont nous avons parlé, régla la constitution militaire de la confédération[1] ; des concordats, conclus tour à tour avec le saint-siége[2] par les différens souverains, réorganisèrent l’église catholique. Le roi de Prusse donna successivement à chacune de ses provinces allemandes des constitutions d’états provinciaux. Enfin, quelques efforts furent tentés pour faire tomber les barrières commerciales qui séparaient les divers états de l’Allemagne, et préparèrent de loin l’union des douanes, qui devait s’accomplir plus tard[3]. Tels sont les seuls évènemens de quelque importance politique que présente l’histoire de la confédération pendant les dix années qui s’écoulèrent de l’acte final de Vienne à la révolution de juillet. La nation, placée sous la double tutelle de la censure et de la police, semblait résignée à la condition qu’on lui avait faite, et toute son activité s’était tournée vers les sciences et les lettres. À voir l’ardeur avec laquelle elle se livrait à l’étude, on pouvait croire que c’était là son seul besoin, sa seule vocation, et qu’absorbée tout

  1. 9 avril 1821, avec les dispositions ultérieures du 12 avril 1821 et du 11 juillet 1822.
  2. Le roi de Bavière signa le sien le 5 juin 1817 ; le roi de Prusse, le 25 mai 1821 ; le roi de Hanovre, le 26 mars 1824 ; les princes dont les états formèrent la province ecclésiastique du Haut-Rhin, le 16 avril 1821 et le 11 avril 1827.
  3. Il y eut un traité d’union entre la Bavière et le Wurtemberg, un autre entre la Prusse et le grand-duché de Hesse-Darmstadt.