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SIMONE.

À ce mot, le peuple étonné
S’approche en foule, on se récrie.
Un médecin est amené,
Il voit un mort, il s’en empare,
Observe, consulte, et déclare
Que Pascal est empoisonné.
À tous ces discours, Simonette,
Ne comprenant que son chagrin,
Restait, la tête dans sa main,
Plus immobile et plus muette
Qu’une pierre sur un tombeau.
Qui devait parler ? C’est Lagine.
Venant d’une ame féminine,
Un tel courage eût été beau.
Ce qu’elle fit, on le devine ;
Elle se tut, faute de cœur,
Et voyant tomber l’infamie
Sur sa compagne et son amie,
Au lieu d’avoir de son malheur
Compassion, elle en eut peur.
Moyennant quoi l’infortunée,
Seule et sans aide contre tous,
Devant le juge fut traînée,
Et là, tomba sur ses genoux,
De ses larmes toute baignée,
Et plus qu’à demi condamnée.
Le juge, ayant tout entendu,
Ne se trouva pas convaincu,
Et, prévoyant quelque mystère,
Voulut, sans remettre l’affaire,
Incontinent l’examiner.
Ne se pouvant imaginer
Ni que la fille fût coupable,
Voyant qu’elle pleurait si fort,
Ni que le jeune homme fût mort
Sans une cause vraisemblable,
Il prit Simone par la main,
Et s’acheminant, sans mot dire,
Avec ses gens, vers le jardin,
Lui-même il voulut la conduire