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UN HIVER AU MIDI DE L’EUROPE.

ceux des fidèles chrétiens) soient exhumés, remis à la justice et au bras séculier, pour être brûlés et réduits en cendres ; que l’on effacera ou râclera toutes inscriptions qui se trouveraient sur les sépultures, ou armes, soit apposées, soit peintes en quelque lieu que ce soit, de manière qu’il ne reste d’eux, sur la face de la terre, que la mémoire de leur sentence et de son exécution. »

Quand on lit de semblables documens, si voisins de notre époque, et quand on voit l’invincible haine qui, après douze ou quinze générations de juifs convertis au christianisme, poursuit encore aujourd’hui cette race infortunée à Majorque, on ne saurait croire que l’esprit de l’inquisition y fût éteint aussi parfaitement qu’on le dit à l’époque du décret de Mendizabal.

Je ne terminerai pas cet article, et je ne sortirai pas du couvent de l’inquisition, sans faire part à mes lecteurs d’une découverte assez curieuse, dont tout l’honneur revient à M. Tastu, et qui eût fait, il y a trente ans, la fortune de cet érudit, à moins qu’il ne l’eût, d’un cœur joyeux, portée au maître du monde, sans songer à en tirer parti pour lui-même, supposition qui est bien plus conforme que l’autre à son caractère d’artiste insouciant et désintéressé. Cette note est trop intéressante pour que j’essaie de la tronquer. La voici telle qu’elle a été remise entre mes mains, avec l’autorisation de la publier.

COUVENT DE SAINT-DOMINIQUE.
À PALMA, DE MALLORCA.

Un compagnon de saint Dominique, Michel de Fabra, fut le fondateur de l’ordre des frères prêcheurs à Mallorca. Il était originaire de la Vieille-Castille, et accompagnait Jacques Ier à la conquête de la grande Baléare, en 1229. Son instruction était grande et variée, sa dévotion remarquable ; ce qui lui donnait auprès du Conquistador, de ses nobles compagnons, et des soldats même, une puissante autorité. Il haranguait les troupes, célébrait le service divin, donnait la communion aux assistans et combattait les infidèles, comme le faisaient à cette époque les ecclésiastiques. Les Arabes disaient que la sainte Vierge et le père Michel seuls les avaient conquis. Les soldats aragonais-calalans priaient, dit-on, après Dieu et la sainte Vierge, le père Michel Fabra.

L’illustre dominicain avait reçu l’habit de son ordre à Toulouse