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HYMNE À LA FAMILLE.

Et bien des coups de foudre émanés des nuages
De leurs jaunes éclairs ont sillonné tes flancs.

Souvent le vil torrent des passions obscures
Est venu de ses flots couvrir les flammes pures
Qu’allumaient sur ton front de paisibles humains ;
Souvent les fruits dorés de l’offrande céleste
Ont été renversés de ton sommet agreste
Par l’envie implacable et ses sanglantes mains.

Souvent l’atroce guerre, en ses courses brutales,
A frappé ton pavé de ses dures sandales,
Et, prenant aux cheveux un vieillard gémissant,
Elle a courbé ses reins sur l’angle de ta pierre,
Et, sous le fer aigu, la lance meurtrière
Comme le sang d’un bœuf fait couler son vieux sang.

Puis mille fois la peste et sa sœur la famine
Ont tout autour de toi promené la ruine,
Entassé les douleurs et les corps en monceaux ;
Et mille fois, hélas ! les pâles multitudes
Ont livré tes flancs nus, au sein des solitudes,
Aux outrages impurs des immondes pourceaux.

Enfin du globe entier la ténébreuse masse
A changé mille fois de posture et de face ;
La terre a chancelé comme un homme insensé ;
L’océan jusqu’au ciel a jeté ses tempêtes ;
Les nations se sont défaites et refaites ;
Les races ont péri, les dieux même ont passé ;

Mais toi seul es resté, debout, inébranlable,
Plus ferme qu’au milieu de leurs plaines de sable
Les éternels tombeaux des puissans Pharaons,
Plus ferme que les rocs du superbe Caucase,
Et plus solide enfin que ne l’est sur sa base
Le grand Himalaya dominateur des monts.

Ah ! certes, ta structure est une œuvre divine.
Certainement c’est Dieu qui planta ta racine