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je crois, les seuls souvenirs qui se rattachent aux rois de Géorgie.

Le consul de France, M. de La Chapelle, ouvre sa maison à tous les voyageurs, qui trouvent près de lui une hospitalité pleine de charmes. Sa conversation, vive et animée sur toutes les questions qui se rattachent à la politique de la France, rendit mon séjour à Tiflis aussi agréable qu’instructif. Je fus présenté au général Golavine, qui me parut affable et bienveillant. Gouverneur de toutes les provinces du Caucase, le général Golavine voudrait contribuer au bien-être des populations qui lui sont confiées ; malgré son bon vouloir, il est rare que ses intentions soient exécutées. Beaucoup d’améliorations se font sur le papier seulement, ou se commencent et ne se terminent pas. Le général Kotzebue, chef de l’état-major du Caucase, auquel j’exprimai le désir de me rendre à Derbent et à Bakou en traversant le Daghestan, voulut bien me promettre toutes facilités pour mon voyage.

Après quelques jours consacrés aux préparatifs du départ et à la recherche de renseignemens sur les diverses provinces que je devais traverser, je quittai Tiflis, me dirigeant vers Signakh. Je trouvai sur ma route quelques colonies allemandes, dont les habitans, grace aux avantages que le gouvernement leur a assurés, jouissent d’une grande aisance. Ces colonies sont loin pourtant d’avoir pris le développement dont elles seraient susceptibles. Les Allemands se bornent à cultiver les terres qui leur ont été abandonnées sans chercher à mettre en valeur les terrains fertiles qui les environnent. Le nombre des colons est de mille environ. Je remarquai quelques villages géorgiens d’un aspect tout pittoresque. Les maisons, entourées d’une petite enceinte en treillage, étaient isolées les unes des autres. De beaux noyers, des sycomores et d’immenses ceps de vigne formaient autour de chaque demeure un rempart de verdure. Ces villages, peu considérables par le nombre des maisons, occupent un vaste espace. Il y avait dans l’aspect de ces habitations agrestes, si heureusement situées, un charme que rehaussaient encore la solitude et la richesse de la végétation.

Signakh, où nous arrivâmes bientôt est une ville peu considérable. Une filature de coton a été établie dans les environs ; mais cette fabrique ne donne que des produits grossiers. La mauvaise direction, l’ignorance et l’avidité des employés ont amené la ruine successive de tous les établissemens que le gouvernement a fondés pour la filature de la soie. Des sommes assez fortes n’ont servi qu’à enrichir les directeurs, sans donner le moindre élan à l’industrie. Pourtant le