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Vondel en fut quitte pour une amende de trois cents florins. La première édition de sa tragédie fut saisie, mais quinze jours après il en parut une seconde, et dans l’espace de quelques années, il s’en répandit en Hollande des milliers d’exemplaires.

En 1627 il fit un voyage en Danemark et en Suède, et fut accueilli avec distinction par Gustave-Adolphe. En 1638, il ouvrit le théâtre d’Amsterdam par une pièce nationale, Gilbert d’Amstel, que l’on joue encore chaque année une fois sur ce théâtre avec ce pieux respect que les Hollandais conservent aux traditions de leur contrée. Ses dernières années se passèrent dans d’amères sollicitudes. La mauvaise conduite de son fils le ruina. Affaibli par l’âge, épuisé par le travail, le poète dont les œuvres étaient dans toutes les familles, et dont le nom jouissait d’une gloire incontestée, fut réduit à implorer un petit emploi au mont-de-piété. Sur la fin de sa vie, il se fit catholique comme Stolberg, comme Werner, comme tant d’autres hommes d’imagination dont le cœur s’est senti mal à l’aise dans la sécheresse dogmatique du protestantisme. Ce fut dans ces idées qu’il écrivit sa tragédie des Vierges et un poème que l’on regarde comme une de ses meilleures productions, et qui a pour titre Mystères de l’autel. Au milieu de ses souffrances physiques et morales, le pauvre Vondel avait encore une crainte, une singulière crainte, celle de mourir. Sans doute, tandis que les heureux financiers d’Amsterdam le regardaient passer avec ses cheveux blancs, son front ridé, et se disaient dans leur cruelle pitié : Le malheureux ! plaise au ciel de lui envoyer la mort pour le délivrer de sa misère ; sans doute il entendait encore vibrer confusément au fond de son cœur les sons harmonieux de sa lyre idéale, et mourir, c’était dire adieu à tous ces chants inachevés, à tous ces rêves poétiques dont il se promettait peut-être encore un rayon de gloire ou une nouvelle sympathie.

Il mourut en 1679, et fut enterré dans l’église neuve d’Amsterdam. Un siècle après, ses admirateurs lui firent ériger un monument avec cette plate épitaphe classique :

Vir Phœbo et musis gratus Vodelius hic est.

Soyez donc un poète national et un poète chrétien pour que cent ans après votre mort les beaux esprits d’un institut, se rappelant un jour le mérite de vos œuvres, latinisent votre nom et le placent par arrêt académique sous le patronage des vieilles divinités olympiennes.

Cats, qui vivait dans le même temps que Hooft et Vondel, est de tous les poètes hollandais celui qui est resté le plus populaire. Sa