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LA HOLLANDE.

ken, les traductions de Jean Nomsz, et même les poésies fugitives de Mme de Lannoy. S’il y a dans ces œuvres, qui faisaient la joie de vos pères, une trace d’originalité, je me déclare coupable, et je vous demande de nouveau pardon.

Le poète qui, à cette époque, avait incontestablement le plus de verve et d’esprit, était Langendyk. Il écrivit des comédies humoristiques dont quelque-unes peignent assez bien certains ridicules ; mais il a peu d’invention, et il tombe souvent dans des détails de mœurs par trop grossiers.

Douze vers de Voltaire m’obligent à parler d’un autre écrivain du XVIIIe siècle, dont les productions sont aujourd’hui très oubliées ou tout au moins très négligées. Il s’appelait Guillaume Van Haren. Une partie de son temps fut employée à remplir des fonctions diplomatiques, une autre à écrire en vers fort durs un long poème épique intitulé Friso. C’est le récit des aventures fabuleuses de ce héros batave dont nous avons parlé dans un précédent article, qui des rives fleuries de l’Inde vint peupler les plaines marécageuses de la Hollande. Quelques critiques néerlandais, dans une effusion de patriotisme en vérité on ne peut plus touchant, ont eu la bonté de dire que cette épopée pourrait bien être placée non loin de l’Énéide. Je pense que, pour lui donner cet éloge, ils ne se seront pas cru obligés de la lire, et il est probable aussi que Voltaire s’était dispensé du même labeur de patience lorsqu’il adressait cette flatteuse épître à l’auteur :

Démosthène au conseil et Pindare au Parnasse,
L’auguste vérité marche devant tes pas.
Tyrtée a dans ton sein répandu son audace,
Et tu tiens sa trompette organe des combats.
Je ne puis t’imiter, mais j’aime ton courage ;
Né pour la liberté, tu penses en héros ;
Mais qui naquit sujet ne doit penser qu’en sage,
Et vivre obscurément s’il veut vivre en repos.
Notre esprit est conforme aux lieux qui l’ont vu naître ;
À Rome on est esclave, à Londres citoyen,
La grandeur d’un Batave est de vivre sans maître,
Et mon premier devoir est de servir le mien.

Guillaume Van Haren avait un frère, qui fit comme lui des poésies lyriques et une épopée. Celle-ci n’a pas moins de vingt-quatre chants, divisés en octaves comme la Jérusalem délivrée. Le sujet en