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de gravité des solides, la théorie de l’aimant, l’occupèrent tour à tour. On a publié deux lettres où ce grand physicien décrit des effets singuliers qu’il avait observés, à cette époque, dans un aimant. Ces observations, qui ont excité l’attention de Leibnitz, mériteraient encore de nos jours d’être étudiées et répétées par les savans, car elles semblent présenter de graves difficultés. En 1609, les travaux de Galilée prirent tout à coup une nouvelle direction : au commencement de cette année, la nouvelle se répandit à Venise qu’on avait présenté en Flandre, à Maurice de Nassau, un instrument construit de manière que les objets éloignés se voyaient comme s’ils étaient rapprochés. On n’ajoutait rien sur la forme de cet appareil. Dans un voyage qu’il fit à Venise, Galilée apprit cette nouvelle, qui lui fut confirmée par une lettre de Paris. De retour à Padoue, il y réfléchit une nuit entière, et le lendemain le télescope qui a pris son nom était construit. Cet instrument, qu’il perfectionna bientôt de manière à pouvoir obtenir un grossissement de mille fois en surface, produisit à Venise la plus grande sensation et excita un enthousiasme universel. Le sénat décréta que désormais Galilée garderait sa chaire durant toute sa vie, avec un traitement de mille florins. Les tours et les clochers de Venise étaient couverts de gens qui, le télescope en main, regardaient les vaisseaux voguant sur la mer Adriatique. À l’aide de cet instrument merveilleux, les Vénitiens espéraient pouvoir toujours surprendre ou éviter leurs ennemis.

L’histoire de cette invention a été racontée par Galilée lui-même, qui ne s’en est jamais attribué le premier honneur, mais qui a toujours affirmé, et ses assertions sont appuyées par tous les témoignages contemporains, qu’il avait deviné le secret et perfectionné la construction de cet instrument. L’artiste du comte de Nassau fut bientôt oublié, et de tous les points de l’Europe on s’adressa à Galilée pour avoir des télescopes. Des documens authentiques prouvent que celui qui avait d’abord construit le télescope en Hollande pouvait à peine grossir cinq fois le diamètre des objets. En 1637, on ne savait pas encore faire en Hollande des lunettes propres à observer les satellites de Jupiter, qui sont cependant si faciles à voir. Ce fait démontre les droits incontestables de Galilée à l’invention du télescope, qui, sans lui, serait resté long-temps inutile entre les mains d’un ouvrier inexpérimenté.

Le sénat de Venise songeait surtout à s’assurer, par le télescope, la domination de la mer : à l’aide de cet instrument, Galilée voulut régner dans le ciel. Ce fut certes une idée aussi simple que féconde