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619. — Ayant pris la princesse dans ses bras, il revint avec elle par le chemin qui conduit au cIel. En arrivant dans le séjour des immortels, ils en admirèrent les beautés ; les maisons étaient de soie et resplendissantes de l’éclat des pierreries.

620. — La princesse contempla avec admiration toutes les magnificences que la bonté du Tout-Puissant a répandues dans ce séjour de délices, et l’éternelle jeunesse des êtres qui l’habitent.


Raffles a analysé plusieurs autres ouvrages kawis qui font partie de sa collection de manuscrits javanais, donnée après sa mort par lady Raffles, sa veuve, à la Société royale asiatique de Londres. Ces manuscrits et ceux de la compagnie des Indes orientales (East India house), les seuls que nous possédions encore en Europe, sont trop peu nombreux et n’ont pas encore été assez étudiés pour que je puisse présenter ici quelques idées arrêtées sur le développement et sur le caractère de la littérature kawi. Ce travail pourra être entrepris plus tard, lorsque ce fonds de manuscrits se sera enrichi des découvertes qui se font tous les jours à Java, et qui ont pris une nouvelle activité depuis que Raffles nous a fait entrevoir la valeur historique et littéraire de cette branche de la poésie orientale.

Mais, pour bien apprécier le caractère de la poésie kawi, il est indispensable d’en éclairer l’étude par celle des restes d’antiquités qui couvrent le sol javanais. Là, comme partout ailleurs, les arts et la littérature émanent d’une même pensée créatrice et se sont développés sous une influence réciproque. Ainsi le type indou domine à la fois dans les épopées kawi et dans les grands bas-reliefs des temples de Brambanam et de Boro Boudor, situés, l’un dans le district de Matarem, et l’autre au milieu des montagnes si pittoresques de Kadou. Dans les livres et dans les monumens de l’art, ce sont les mêmes personnages, les mêmes légendes, la même fusion des dogmes brahmaniques ou du culte de Siwa avec les doctrines bouddhiques. Entre le temple de Brambanam et celui de Boro Boudor, il y a néanmoins cette différence que le premier paraît se rattacher plus spécialement du culte de Siwa, et le second au bouddhisme, tel qu’il était professé à Java dans le XIIe et le XIIIe siècles de notre ère. C’est à cette époque que l’on pourrait rapporter la composition du Niti Sastra, traité de morale écrit en kawi et né de la même inspiration religieuse qui présida à l’érection du temple de Boro Boudor. La pureté tout ascétique des préceptes enseignés dans le Niti Sastra semble rappeler la pensée du fondateur du bouddhisme avec la même