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Page:Revue des Deux Mondes - 1841 - tome 28.djvu/61

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DES AUTEURS ESPAGNOLS CONTEMPORAINS.

de Saint-Telmo, il reçut à vingt-huit ans les ordres sacrés. Polygraphe, traducteur, poète élégant et pur, prosateur sensé et vigoureux, il a plus de profondeur dans la pensée que Navarrete, et moins de puissance dans le style que Quintana. Rien de plus juste et de plus simplement exprimé que l’explication qu’il a donnée, au commencement de sa traduction du onzième volume de l’Histoire universelle de M. de Ségur, du principe politique par lequel le moyen-âge a été régi. On trouve, dans cette page, non pas la défense de l’inquisition, mais le mot réel de cette énigme si long-temps obscurcie par les philosophes. C’est le commentaire bref et complet des institutions de l’Espagne, de son génie réel et du rang qu’elle doit occuper entre les peuples modernes. « Le principe religieux, dit Lista, soutint pendant huit siècles la grande querelle des chrétiens contre les mahométans. Ce fut le christianisme érigé en pouvoir politique et visible, qui, sous Charles Martel, arma la France dans les plaines de Tours, lui qui délivra la Sicile et l’Italie du pouvoir des Sarrazins, lui qui civilisa les provinces du nord et du Nouveau-Monde, lui qui donna la première idée des parlemens, modelés, dans l’origine, sur les synodes où les évêques représentaient leurs églises, et qui, en divers pays, comme en Espagne, portèrent le nom même de conciles. Ce fut lui qui répandit le goût et l’étude du droit romain, lui qui créa la suprématie des pontifes, lui, enfin, qui précipita toute l’Europe contre l’Asie, et qui découvrit aux yeux des peuples occidentaux les élémens de la civilisation antique, dans ces mêmes régions où ils allaient chercher la mort pour leur Dieu.

« On ne peut méconnaître cette vérité, que dans l’Occident européen, envahi par les barbares, la religion fut une puissance politique au moment où tous les autres principes conservateurs de la société faisaient défaut. Mais comment concevoir une force politique sans pouvoir coercitif ? Il fallut promulguer des lois dirigées contre les transgresseurs de la religion, et ces lois furent sévères, car l’hérésie était un crime de haute trahison contre la première autorité de l’état. Ce fut un devoir de faire la guerre aux hérétiques et aux idolâtres, par la même raison qu’une puissance fait la guerre à ses ennemis. Le christianisme ne soutenait pas ces hostilités par lui-même et pour lui-même, il ne reconnaît pour armes que la persuasion. C’était la société qui défendait en lui son dernier lien. Si l’on médite sur ces vérités, on pourra réduire à leur juste valeur les diatribes et les sarcasmes des philosophes du XVIIIe siècle contre l’intolérance et le fanatisme, contre les guerres religieuses, contre les supplices et