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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 29.djvu/289

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FRANÇOUNETTO.

langues d’Espagne et d’Italie ; celui-là n’a pas oublié que Pétrarque a appris à chanter au bord d’une fontaine de Provence, et que les rois d’Aragon ont appelé à Barcelone des maîtres dans l’art des vers du pays toujousain pour apprendre d’eux ce qu’on appelait alors le gai savoir, el gay saber.

Toutes ces grandeurs ont disparu, mais le fond du vieux langage est resté. Tout altéré qu’il est par une longue infiltration du français, ce langage antique a conservé des restes nombreux de son originalité primitive. Six siècles de proscription n’ont pu éteindre complètement son génie. Seulement, après avoir été l’organe des cours les plus polies et de la société la plus raffinée de la première moitié du moyen-âge, il est devenu l’idiome du peuple seul. S’il a perdu cette subtilité, cette recherche élégante qu’il avait apprise dans les cours d’amour, et par le commerce d’esprit des princesses avec les poètes de son beau temps, il a gagné à se retremper dans des mœurs moins apprêtées plus de vie et de liberté. Il est maintenant plus grossier, mais plus expressif, et les sentimens, les idées qu’il rend, pour lui venir de l’ouvrier et du paysan au lieu du chevalier et de la dame, n’en ont que plus de franchise et de verdeur.

Avant d’entrer dans l’examen du nouveau recueil de Jasmin, il est nécessaire de dire ici quelques mots des formes de la langue et de sa prononciation, afin de rendre autant que possible les beautés du texte intelligibles à ceux qui sont nés loin des anciennes provinces du Languedoc, de la Guienne ou de la Provence.

Le patois méridional, connu à Paris sous le nom générique de patois gascon, se divise, comme tous les patois, en un nombre infini de dialectes. Les principaux sont : le provençal proprement dit, qui se parle d’Avignon à Marseille, et dont le caractère distinctif est d’être rude et grasseyant ; le bas-languedocien, dont le siége est à Montpellier, et qui est, au contraire, d’une douceur et d’une mignardise extrêmes ; le gascon proprement dit, qui est répandu dans toute l’ancienne Gascogne, au pied des Pyrénées, et qui est le plus âpre, le moins altéré de tous, parce que le pays où il domine a été le dernier ouvert à l’influence du nord ; le béarnais, qui règne à Pau, et qui a gardé quelque chose de l’ancienne culture de la cour de Navarre ; enfin, le dialecte qui se parle dans la vallée de la Garonne, et qui est comme le mélange de tous les autres, singulièrement modifiés par un contact plus immédiat avec le français. C’est ce dernier que parle Jasmin. Il y aurait une étude très intéressante à faire sur les