lation active, enthousiaste des arts : aujourd’hui ce n’est qu’un désert, et l’archéologue qui vient y interroger le passé est souvent réduit à des conjectures sur l’emplacement des monumens les plus fameux ; témoin le temple de la Diane d’Éphèse, pour lequel nous avons, en ce moment même, à choisir entre deux ou trois monceaux de ruines plus défigurées les unes que les autres.
Notre bon papas non-seulement nous accompagna à Claros, mais nous annonça qu’il nous suivrait le lendemain à Éphèse. En attendant, il s’offrit à nous aller chercher du vin de Samos, non pas dans l’île de ce nom que nous avions en face de notre antre, de l’autre côté du golfe, mais dans un village à une lieue de distance ; nous applaudîmes tous à cette addition au menu du dîner ; le papas ne fut pas le moins gai de la bande, ce qui ne l’empêcha pas de psalmodier ensuite ses prières entremêlées de force Kyrie eleïson. De son côté, Méhémet, retiré à l’écart, faisait dévotement les siennes, tourné du côté de la Mecque. Il est difficile de concevoir un ensemble plus pittoresque que celui que nous formions dans cette station.
Avant-hier, de grand matin, nous étions en route par un chemin très âpre, franchissant plusieurs des promontoires qui nous séparaient d’Éphèse ; à plusieurs reprises je me suis cru, à cela près d’une route pour les voitures, sur cette corniche de la côte de Ligurie, que nous aimons tant. Ici nous avions en plus la vue d’un beau golfe. Pour gagner Éphèse, il faut contourner les marais qui occupent aujourd’hui presque toute la vallée du Caystre. Nous traversâmes d’abord un bras de ce fleuve à gué, tout à côté de la plage ; il y avait là autrefois un pont, mais il est tombé, et, règle générale, les Turcs, ne réparent jamais rien. Nos effets ne furent heureusement pas mouillés ; j’avais tremblé un instant pour les malles remplies de plantes. Du gué au bras principal du Caystre, on suit une plage recouverte d’un sable fin ; de petites vagues, comme en offre la mer la plus calme, lavaient les pieds de nos chevaux. Le bac du fleuve est établi auprès de la jetée que fit maladroitement construire Attale-Philadelphe dans le dessein de resserrer l’entrée du port et de le préserver des attérissemens ; mais ce travail, blâmé de Strabon, n’a fait que hâter l’encombrement du port, à peine reconnaissable aujourd’hui dans une lagune voisine. En Hongrie, j’avais déjà traversé un lac dans un bac de forme bizarre : c’était un gros arbre creusé à la manière des sauvages. Le bac du Caystre n’est pas moins original : c’est une espèce de caisse exactement triangulaire, manœuvrée au moyen d’une traille. Notre troupe passa en trois divisions et sans encombre. Une demi-heure