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assembla plusieurs de ses suffragans dans son palais de Lambeth, à Londres. Il paraît que, dans ce synode, le primat d’Angleterre exprima l’espoir que ces premières relations pourraient préparer la conversion des calvinistes et des luthériens du continent à la religion anglicane, et amener « une unité essentielle de discipline comme de doctrine entre l’église anglicane et les églises protestantes moins parfaitement constituées de l’Europe. »

L’Angleterre accepta. Dans la courte session qui suivit les dernières élections, le parlement passa un bill pour les évêques étrangers (foreign bishops bill), et le dimanche 7 novembre 1841, l’archevêque de Cantorbéry, assisté de trois évêques, consacra le révérend Michel-Salomon Alexander, juif converti, évêque d’Angleterre et d’Irlande à Jérusalem. La juridiction de l’évêque s’étend à la Syrie, la Chaldée, l’Égypte et l’Abyssinie. Son traitement est de 1,200 liv. st. par an (30,000 fr.). Le capital de cette rente se compose de 15,000 liv. st. (375,000 fr.) donnés par le roi de Prusse, et d’une somme égale qui sera levée en Angleterre par contributions volontaires. Ce capital de 30,000 fr. sera placé sur des terres en Palestine. Telle est la constitution matérielle du nouvel évêché : voyons quelle est sa constitution spirituelle.

« Les négociations à entamer, dit le roi de Prusse[1], dépendaient de la question préalable de savoir si la Grande-Bretagne était disposée à rendre justice à l’indépendance et à l’honneur national de l’église germano-évangélique, et à traiter cette affaire de plein concert avec la Prusse, d’après le principe arrêté que la chrétienté évangélique se présenterait au gouvernement ottoman, sous le protectorat de l’Angleterre et de la Prusse, comme une unité, et aurait en partage tous les avantages d’une reconnaissance légale de la part de ce gouvernement. Les démarches qui furent faites pour résoudre cette question eurent le plus heureux résultat. Non-seulement le gouvernement britannique se montra prêt, avec une bienveillance empressée, à s’occuper de l’affaire sur les bases proposées, mais aussi les chefs de l’église anglicane accueillirent la proposition avec un vif intérêt. On se réunit, dans la conviction que la diversité du culte religieux chrétien, d’après les langues et les peuples, et d’après les qualités particulières et les évènemens historiques de chaque nation, est, surtout dans l’église évangélique, dominée par une unité plus élevée, par le seigneur de l’église, et que dans cette unité vers laquelle se portent toutes les diversités comme vers leur centre réside la base de la véritable charité chrétienne. Cependant, à côté de cette conviction, sa majesté partage trop vivement les sympathies nationales religieuses qui se rattachent à l’origine de la confession d’Augsbourg et au souvenir des héros de la foi de l’église évangélique allemande, pour qu’il ait pu préjudicier en quoi que ce soit à cette solide base commune de l’église nationale allemande. Par suite d’une intime coopération, conduite dans cet esprit, il a été fondé un nouvel évêché à Jérusalem, où tous les chrétiens évangéliques pourront trouver, vis-

  1. Circulaires royales, Gazette d’état de Prusse, Berlin, 16 novembre 1841.