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tions données par le saint-siége, sans que le gouvernement osât de nouveau employer la force contre une résistance devenue trop générale. Un seul prélat, l’évêque de Breslau, gagné par je ne sais quelles faveurs de cour, se montra disposé à faire toutes les concessions qui lui seraient demandées ; mais, quoique son diocèse fût peut-être celui où le propagandisme anti-catholique avait travaillé avec le plus de succès, il trouva une telle opposition dans le clergé et dans les fidèles, que sa défection ne fut d’aucun profit pour ceux qui l’avaient provoquée[1].

Le mouvement donné aux esprits par la lutte engagée entre le cabinet de Berlin et l’église catholique ne pouvait manquer de se reproduire dans la presse, et en effet il s’ensuivit une controverse très vive à laquelle presque toute l’Allemagne prit part. Peu après l’allocution du saint-père, on vit paraître un Exposé de la conduite du gouvernement prussien dans l’affaire de Cologne, rédigé, dit-on, par M. de Bunsen, et où l’apologie des ministres de Frédéric-Guillaume III était appuyée sur un choix de pièces officielles assez adroitement arrangé pour en imposer à l’opinion publique. Ce manifeste amena une réponse de la part du gouvernement pontifical, qui, sortant à propos de ses habitudes de réserve, publia à son tour un Exposé où toutes les allégations de la partie adverse étaient réfutées par des documens accablans, d’autant mieux connus de l’avocat de la Prusse, que la plupart émanaient de lui, mais qu’il avait cru devoir rester à jamais ensevelis dans les cartons de la chancellerie romaine. Cet écrit fit grand tort au cabinet de Berlin en montrant la contradiction flagrante qui avait existé entre ses paroles et ses actes, et en révélant dans sa conduite un degré de duplicité et de mauvaise foi qu’on n’aurait jamais osé lui imputer si l’on n’en avait eu sous les yeux la preuve irrécusable. Indépendamment des publications semi-officielles dont nous venons de parler, l’affaire de Cologne, avec tout ce qui s’y rattachait, devint pour la presse allemande un thème inépuisable, et la polémique entre les catholiques et les protestans se ranima à cette occasion avec une ardeur et une vivacité incroyables. Le gouvernement prussien fit tout son possible pour empêcher la circulation des écrits favorables à l’archevêque de Cologne, tandis que, d’un autre côté, il favorisait la propagation d’une foule de pamphlets où l’on traitait de la manière la plus injurieuse, soit M. de Droste et ses défen-

  1. La position de ce prélat n’a pas tardé à devenir intolérable, et le pape lui a fait demander sa démission, qui a été donnée au commencement de cette année.