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DE LA POÉSIE LYRIQUE EN ALLEMAGNE.


« J’interrogeai une fois l’esprit et lui demandai si véritablement on pouvait grandir encore après la mort, comme semblaient l’indiquer différentes apparitions d’êtres enlevés à la vie dès leur première enfance et que je retrouvais avec la taille et le développement d’un âge plus avancé. Et l’esprit me répondit : Oui, lorsqu’il arrive à un être de quitter la terre avant d’avoir atteint sa croissance complémentaire. L’ame se forme alors peu à peu une enveloppe qui grandit ensuite jusqu’au volume qu’elle aurait eu ici-bas. Cette enveloppe est, d’ordinaire, chez les enfans d’une transparence lumineuse et semblable au corps des saints. »

Suivent les théories mystiques de la visionnaire sur cette croissance ultérieure :

« L’ame d’un enfant, arrêtée avant sa croissance, doit nécessairement se développer au-delà de cette vie, d’abord parce qu’elle est en état de pureté, ensuite parce que la force plastique de l’esprit des nerfs n’a pu encore, dans un enfant, atteindre son type qui est d’être parallèle à l’ame.

« Cette faculté de converser avec les esprits était commune à la plupart des membres de la famille de Frédérique ; son frère surtout l’avait, bien qu’à un moindre degré et sans qu’on pût remarquer chez lui les phénomènes cataleptiques qui se manifestaient chez la visionnaire. Ainsi je l’ai souvent entendu raconter plusieurs apparitions simultanées qui l’avaient frappé avec sa sœur. Un jour, comme nous causions, il s’interrompit tout à coup en s’écriant : « Silence ! un esprit vient de traverser cette chambre pour se rendre chez ma « sœur. » Et presque au même instant, nous entendîmes Frédérique qui s’entretenait avec le fantôme.

« Les personnes qui veillaient dans la chambre de Frédérique, lorsqu’une apparition survenait, en avaient le sentiment par des rêves étranges, dont elles parlaient le lendemain. Chez d’autres, la venue des esprits excitait un malaise général, une suffocation, parfois des tiraillemens dans l’épigastre qui allaient jusqu’à d’effrayantes syncopes. — Frédérique prétendait aussi qu’aux organisations nerveuses qui recherchent le commerce des esprits l’hiver est un temps plus favorable que l’été, l’homme vivant davantage en lui-même pendant l’hiver, et concentrant dans le foyer intérieur des facultés qu’il dissémine aux beaux jours. Une chose certaine, c’est que la vie tellurique domine alors, et que l’époque des apparitions date surtout du solstice d’hiver, solstitium hiemale. De là, dans les livres saints, le sens mystique de l’Avent, et de ces douze nuits, à partir de Noël jusqu’au 6 janvier, qu’on désigne comme la période que les esprits affectionnent.

« La plupart du temps, ces esprits menaient avec eux des bruits appréciables aux oreilles des personnes qui se trouvaient là par hasard. C’étaient

    langue n’en accorde au mot. Avant Kerner, le symbolisme antique n’a-t-il pas fait d’Apollon le dieu des poètes, des visionnaires et des médecins ?