sairement des artistes qui croyaient peu à l’imitation de ceux qui les avaient devancés et qui avaient cru sincèrement. Cette imitation modérée dans le principe et contenue dans certaines limites par les chefs du mouvement, se transforma bientôt en une sorte d’adoration exclusive des maîtres primitifs et de fanatique admiration pour leurs œuvres ; elle précipita la queue de l’école dans les plus incroyables excès ; de Giotto et de Cimabuë on remonta brusquement jusqu’aux byzantins.
L’axiome fondamental de la nouvelle école allemande, que répètent sous toutes les formes les théoriciens dont nous avons parcouru les ouvrages et dont nous avons cité les noms en tête de cet article, que professent les maîtres et que les disciples s’efforcent, à leur exemple, de mettre en pratique, c’est que l’art forme une chaîne qui ne peut être interrompue. C’est pour être fidèles à ce principe, dont ils font toutefois une application erronée, que ces inflexibles logiciens sont retournés aux traditions byzantines. Mais cette chaîne des arts ne remonte-t-elle donc pas bien au-delà des byzantins ? Au lieu de la reprendre à son origine, ils la reprennent seulement à une de ses interruptions, au brisement d’un des chaînons. Cornélius, le plus original des imitateurs, a dit quelque part qu’il y avait plus de mérite à suivre les anciens modèles qu’à se frayer une route nouvelle ; si Cornélius fût resté fidèle à cette maxime, il ne serait pas ce qu’il est. Uhland, qui faisait à la théorie de l’art une heureuse application du sentiment poétique, a professé des doctrines contraires que l’école aurait dû sérieusement méditer. Lorsqu’il retrouvait dans le conte de la Belle au bois dormant le symbole du long sommeil de la poésie nationale au fond des forêts allemandes, il pensait sans doute à la peinture sa sœur ; aussi opposait-il à la tendance à l’imitation qui se manifestait de toutes parts et qui ne pouvait que prolonger ce fatal engourdissement de l’art, le système de la force créatrice, qui agit isolément, incessamment, et qui tend à produire sans cesse du nouveau. Malheureusement sa voix resta sans écho ; l’imitation prévalut ; il est curieux de rechercher jusqu’à quel point, et d’examiner la valeur des modèles qu’étudièrent et que reproduisirent à l’envi ces prétendus restaurateurs de l’art.
La basilique de Saint-Marc à Venise est l’un des monumens les plus complets et les plus curieux de l’art au moyen-âge. Construite sur le modèle de Sainte-Sophie par des architectes venus de Constantinople, décorée de mosaïques par les artistes grecs, qui florissaient du IXe au XIIe siècle, elle offre dans toutes les parties que le goût des