Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 30.djvu/257

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
251
LE SALON.

gauche, et l’inférieure à droite. C’est l’exagération du maniérisme florentin qui n’atteint souvent la force et l’élégance qu’à l’aide des disproportions. Il y a pourtant au fond de tout cela quelque chose qui frappe, saisit et attache. Le mouvement en avant de la figure est bien senti ; l’action de la main qui relève le manteau pour découvrir la tête d’Holopherne que la main gauche va planter sur un croc, est assez fièrement exprimée. On peut trouver sur le visage immobile de Judith la sombre exaltation de son sanglant triomphe. La tête d’Holopherne est une tête coupée ; elle est véritablement morte. Un talent capable de mettre tout cela dans un marbre, n’avait, ce semble, pas besoin de poursuivre ainsi à toute outrance une originalité d’emprunt, au risque de n’arriver qu’à des singularités puériles et baroques. Comment concilier ce sentiment réel de l’art avec de telles aberrations du goût, tant de facultés et tant de faiblesses ? Modò vir, modò femina.

Grace au livret, nous savons que la statue en marbre de M. Desbœufs, tout près d’Olympia, doit s’appeler l’Histoire. Cette figure est insignifiante de dessin et de caractère, d’une exécution pénible et molle. Le ciseau de cet artiste a fait mieux.

À côté de cette triste muse se trouve une fort aimable figure de jeune fille couchée, ou plutôt assise, et que M. Droz, son auteur, a jugé à propos d’appeler le Lierre. Il y a en effet une branche de lierre à côté ; mais le nom n’y fait rien. Cette figure a de la grace ; sa pose est heureuse, et présente de tous côtés un aspect satisfaisant ; le modelé a de la finesse et de la solidité ; la tête exprime une gaieté mêlée de quelque malice. Nous voudrions que ce morceau fût un début pour en féliciter l’artiste. L’Amour coupant ses ailes de M. Bonassieux ferait un très joli pendant à ce Lierre. Le sentiment en est naïf et rendu avec beaucoup de charme. Cette figure est un envoi de Rome et fait honneur à l’académie, qui devrait bien prendre l’habitude d’en envoyer souvent de pareilles.

La Vierge (statue colossale) de M. Lescorné est d’une imposante disposition de lignes ; la draperie est grandement jetée et se développe en belles masses sur les côtés et sur la poitrine. La pression des deux bras, croisés dans l’attitude de l’adoration, se fait bien sentir. La tête nous satisferait moins que le reste. Cette figure, destinée probablement à une niche, aura à sa place un bel aspect monumental.

M. Jacquot a répété le motif de la Surprise, qui l’a été déjà si souvent depuis la Vénus de Cléomènes jusqu’à celle de Canova. C’est