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PUITS ARTÉSIENS.

reparaître plusieurs fois de suite. On a parcouru la caverne d’Adelsberg sur une largeur de deux lieues, mais on n’en a pas atteint l’extrémité ; un grand lac a jusqu’ici arrêté tous les curieux.

On sait qu’en France la Meuse se perd dans les terres au-dessus du village de Bazoilles, pour reparaître ensuite à Neuf-Château, une lieue plus loin ; on sait que, dans le département de l’Eure, la Rille disparaît de même près de Beaumont, et qu’elle parcourt sous terre la même étendue de chemin à peu près. Dans la Côte-d’Or, la Venelle, le Suzon, sont absorbés par les terres, par le sol des prairies, mais sans qu’on aperçoive aucune cavité dans le sol. La forêt de Senonches voit l’Eure disparaître de même dans une partie de son étendue ; la Normandie nous offre aussi les exemples de l’Iton, de la Rille, de l’Aure, du Drom, dont les eaux sont absorbées peu à peu par de nombreux bétoirs ouverts en divers points du fleuve. Les touristes vont surtout visiter le Drom, qui, après avoir laissé une partie de ses eaux dans les plaines et dans les prairies de Bayeux, s’engouffre dans la fosse de Soucy, qui est large de 12 mètres environ.

L’Espagne nous offre l’exemple de la Guadiana, qui, après s’être infiltrée dans des terrains sablonneux et marécageux, reparaît plus forte qu’auparavant. La Grèce présente bien des faits semblables : tels sont les gouffres du lac Stymphale, du lac Copaïs, celui de Tsipiana, près de Mantinée, dans l’intérieur duquel on a construit un moulin pour profiter de la chute d’eau. Les amas d’eau souterrains qu’on trouve dans les cavernes, près de Rhéondas, sont, en été, la ressource des bergers qui fréquentent les plateaux arides de la Tzakonie.

M. de Humboldt cite, dans son voyage en Amérique, une caverne que parcourt une rivière large de dix mètres. On ne connaît pas toute la profondeur de cette cavité, qui conserve constamment dans la même direction, sur une longueur d’un demi-quart de lieue, une hauteur de 24 mètres, sur une largeur de 27.

La célèbre fontaine de Vaucluse, la Source du Loiret, et tant d’autres sources abondantes sont des preuves moins directes, mais non moins convaincantes, de l’existence des grands courans d’eau souterrains. La première donne, terme moyen, neuf cents tonnes d’eau par minute, c’est-à-dire à peu près deux cent vingt-cinq fois autant que le puits de Grenelle, et la Sorgue, à laquelle elle donne naissance, est une véritable rivière dès son point de départ. Comment une telle quantité d’eau surgirait-elle à la fois, si elle ne circulait pas auparavant, avec une certaine liberté, dans quelque large canal souterrain ? La Loue, qui, dans le Jura, donne le mouvement à plu-