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tance entre le bas de ces tubes et le fond du puits. Or, il faut que l’on sache qu’au moment où le forage de Grenelle a atteint la nappe d’eau jaillissante, les quarante derniers mètres, à partir du fond du puits, n’étaient pas encore tubés. On était alors dans la région des argiles déjà plus ou moins mêlées de sable, c’est-à-dire dans un terrain malheureusement trop sujet aux éboulemens ; on a continué le travail comme on l’eût fait loin des eaux, en pleine roche, et, quand ces eaux ont fait éruption, elles ont labouré, déchiré les parois si tendres, si meubles, elles ont creusé en voûte la partie inférieure du puits ; enfin elles se sont salies de tous ces débris de la masse argileuse auxquels s’est joint le sable vert de la couche dans laquelle existait la nappe d’eau.

Peut être, pour atténuer la faute qu’ils ont commise, les directeurs du forage de Grenelle objecteront-ils que, même avec un tubage poussé jusqu’au fond du puits, les eaux seraient venues troubles ; peut-être diront-ils que cette absence de limpidité est due tout autant aux particules de la couche sableuse à demi fluide qu’avait atteinte la sonde, qu’aux débris qui proviennent de l’éboulement causé par l’absence du tube ; mais on leur répliquera que le sable seul, sans les argiles, donnerait des eaux plus faciles à clarifier, moins louches surtout, et que d’ailleurs rien ne prouve qu’en faisant descendre un peu plus bas le tube, au milieu des sables même, on n’eût obtenu des eaux limpides au bout de quelque temps. L’exemple des nombreux puits forés de la Touraine, de ceux d’Elbeuf, de Rouen, qui atteignent la même couche sableuse, n’est-il pas une présomption des plus fortes en faveur de la dernière opinion ?

Telle est la quantité de sables argileux qu’a vomis pendant un an le puits de Grenelle, qu’il a fallu souvent employer une brigade d’ouvriers et de tombereaux pour curer l’égout de l’abattoir. En n’opérant qu’incomplètement ce curage, en laissant le torrent d’eau tiède entraîner vers la Seine une grande partie des sables, des argiles qui sortaient du puits, on a dépensé plus de 12,000 francs depuis le mois de mars de l’année dernière. Mais il reste à nettoyer complètement les égouts qui, sur une grande longueur, sont encombrés d’une couche qui a près d’un mètre de hauteur. Il reste aussi à nettoyer le lit de la rivière, où s’est formée une barre qui peut, en été, nuire à la navigation. Si l’on tient compte de ce surcroît de frais, on trouvera que la dépense annuelle de ce curage représente la rente d’un capital de près de 300,000 francs, c’est-à-dire d’un capital supérieur à celui que demanderait la compagnie de la sonde française