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LES ÉLECTIONS.

peu des dissertations et des efforts que prodigue la Gazette de France pour prouver qu’il n’y a pas de contradiction à faire le contraire de ce qu’on avait promis et proclamé ; il laisse M. de Genoude prêcher dans le vide, et il vaque à ses affaires.

Puisque les royalistes se décident à user de leurs droits électoraux, comment s’étonner qu’ils aient renoncé à chercher leurs inspirations dans la Gazette de France ? Cette feuille, dans sa politique chimérique, réprouve tout ce qui existe, hommes et choses ; la charte de 1830 est pour elle un attentat au droit commun ; tous les hommes qui ont gouverné le pays depuis douze ans sont à ses yeux coupables au même degré. Non-seulement elle combat M. Thiers, mais elle attaque également les deux principaux représentans de la politique des conservateurs, M. Guizot et M. Molé. Ces trois hommes, dit-elle, c’est-à-dire les trois ministres du 15 avril, du 1er  mars et du 29 octobre, se sont faits les instrumens de l’arbitraire ; ils se sont montrés tous trois ennemis de la monarchie et de la liberté, amis du despotisme et de la révolution. Les mandats des électeurs aux députés doivent donc donner l’exclusion à ces trois hommes. Jamais l’ostracisme d’Athènes n’aura été mieux appliqué ! Jamais, dirons-nous à notre tour, la confusion des idées ne s’est élevée à plus de folie. Un prêtre journaliste invoquant l’ostracisme d’Athènes contre M. Guizot et M. Molé, et les dénonçant comme révolutionnaires, est à coup sûr un des accidens les plus bouffons qu’ait pu amener de nos jours l’anarchie des idées.

Un jeune écrivain s’est préoccupé de l’influence que devaient exercer les légitimistes sur les élections, et il a voulu opposer l’action de M. de Lamartine à l’action de MM. Berryer et de Genoude sur ce parti. D’abord, à l’heure qu’il est, l’influence de M. de Genoude n’a pas besoin d’être combattue, car elle est complètement annulée. Quant à M. Berryer, qui reste toujours le plus éloquent organe des royalistes, nous le croyons plus puissant comme orateur que comme chef de parti ; il parle, mais il ne mène point. Puisque l’auteur des Vues sur les élections de 1842 s’occupait des légitimistes, il eût dû caractériser leur situation, leur esprit, et ne pas se contenter d’une phrase ou deux sur l’aristocratie expirante. Enfin il ne nous semble pas que M. de Lamartine ait aujourd’hui pour mission spéciale d’être le chef des légitimistes modérés ; tel a pu être son point de départ, nais il a depuis agrandi son rôle et son but. Il a montré l’ambition de se faire l’organe et le représentant de ce que les principes de 1789