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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 31.djvu/470

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REVUE DES DEUX MONDES.

le samedi, jour de marché, et qu’il est censé devoir être employé à acheter des provisions pour la semaine. La distribution a généralement lieu dans une auberge désignée à cet effet, et les votans reçoivent alors de 10 à 12 shellings… Mais il est encore douteux que l’argent du panier puisse être considéré comme un acte de corruption… Nous aurions donc eu à prouver que d’autre argent avait été donné directement pour des votes. —

Ceci n’est qu’une seule des variétés de corruption employées à Nottingham ; il y en a d’autres infiniment plus pittoresques, telle que celle qui consiste à enfermer les votans comme des moutons dans un parc, ou à les emporter ivres à quelques vingtaines de milles du lieu de l’élection. Nous laissons encore parler l’agent de M. Walter :

« Nous aurions prouvé qu’un grand nombre des votans avaient été enivrés et emmenés dans différens endroits du voisinage et quelquefois très loin ; il y en a vingt qui ont été emmenés jusqu’à Gravesend. Nous aurions prouvé que pendant ces voyages on avait déterminé plusieurs de ces hommes à promettre leur vote, et que ceux qui ne l’avaient pas promis avaient été emmenés à une telle distance qu’ils n’auraient jamais pu revenir à temps pour voter.

D. — Pourriez-vous dire combien on en a ainsi transporté ?

R. — Je puis dire qu’environ trois cents électeurs ont été ainsi emmenés dans différentes parties du royaume. J’ai cité Gravesend parce que cette ville est très loin de Nottingham.

D. — N’y a-t-il pas eu des électeurs enfermés (cooped) ?

R. — Oui ; il y en a eu qui ont été enfermés, non pas à Nottingham, mais à douze milles de là, dans des maisons.

D. — Pourriez-vous dire dans quelles maisons ?

R. — Dans celle de lord Rancliffe, etc., et aussi dans les jardins de lord Melbourne, à Melbourne. Ils ont été parqués dans les jardins de lord Melbourne trois ou quatre jours avant l’élection ; ils couchaient comme ils pouvaient dans les auberges du voisinage ; le matin, on les emmenait dans les jardins, on les y gardait toute la journée, et on les faisait boire pour pouvoir les garder la nuit.

D. — Combien y avait-il d’électeurs ?

R. — Cinq mille, et j’ai calculé qu’il y en avait deux mille qui avaient été achetés.

Décidément, le ministère de lord Melbourne ne brille pas dans toute cette affaire ; ce sont les jardins de lord Melbourne lui-même, alors premier ministre, qui servent à parquer le troupeau électoral, et ces procédés cavaliers s’exécutent précisément au bénéfice d’un