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par conséquences indirectes ? Il a oublié de nous le dire, d’expliquer plus nettement sa pensée. S’il avait essayé d’énumérer quelques-unes de ces causes indirectes, il aurait bientôt découvert que la distinction manquait de fondement, et que ce qui était licite dans un cas l’était également dans tous. La rectitude de son esprit lui aurait fait reconnaître que, par la question de la Créole, les États-Unis affaiblissaient en quelque sorte leurs justes réclamations sur d’autres points essentiels : rien n’est moins habile que de mêler une vaine prétention à des réclamations sérieuses et fondées.

Quoi qu’il en soit, comment du moins n’a-t-il pas vu qu’il changeait arbitrairement les termes de la question en demandant de quel droit les autorités étrangères intervenaient pour protéger des criminels ?

Intervenir ! L’Angleterre n’est pas intervenue. L’équivoque est trop forte, et c’est cependant sur cette équivoque que se fonde la prétention des États-Unis. L’Angleterre met chez elle à exécution ses principes, ses lois, et on appelle cela intervenir ! Elle intervient dans les affaires des États-Unis, parce qu’elle ne veut pas, sur son territoire à elle, déployer la force à leur profit, saisir des hommes et les leur livrer ! Elle intervient parce qu’elle s’abstient, parce qu’elle ne permet pas que des constables et des soldats anglais se transforment en constables et en soldats de l’Amérique !

Et M. Wheaton nous dit : « Nous ne pouvons pas comprendre qu’il y ait lieu d’établir une distinction entre une cargaison d’esclaves illégalement capturée et amenée dans un port anglais en temps de guerre, et un bâtiment américain naviguant d’un port des États-Unis à un autre, avec des esclaves transportés à bord, et contraint par la tempête, par la révolte des esclaves, ou par une autre cause inévitable, à relâcher dans un port anglais en temps de paix ! »

Il n’est rien, cependant, de plus facile à comprendre qu’une distinction si saillante.

Dans le premier cas, l’Angleterre se serait arrogé le droit de saisir des hommes et des propriétés américaines sur un territoire commun à tous, là où les lois anglaises n’avaient pas d’empire propre et exclusif ; elle aurait agi hors de sa juridiction territoriale, elle serait intervenue au mépris des droits de l’Amérique.

Dans le second cas, l’Angleterre se borne à ne rien faire ; maîtresse chez elle, elle laisse à ses lois leur empire ; elle se refuse aux sollicitations d’une autorité étrangère ; elle ne veut pas lui prêter