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Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 32.djvu/502

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REVUE DES DEUX MONDES.

celin[1], qui forme une des branches les plus importantes du commerce de ce royaume, ne peut nous être hostile ; c’est moins une rivale qu’une utile auxiliaire que nous devons voir dans la Belgique ; ses intérêts sont semblables aux nôtres : comme nous, elle fabrique ses matières premières, ses toiles entrent dans nos assortimens, comme nos cretonnes, qui conservent leur supériorité, entrent dans les siens ; comme chez nous, c’est la population de ses campagnes qui se livre au tissage. Enfin, c’est graduellement et en rapport avec nos progrès dans l’établissement des filatures qu’elle forme ses ateliers. Il y a similitude et communauté d’intérêts. Cette opinion de M. Estancelin se trouve confirmée par les résultats des deux enquêtes auxquelles on s’est livré en France, l’une en 1834 et l’autre en 1838. Les hommes les plus versés dans le commerce des fils ainsi que des toiles s’accordent à reconnaître que, du temps de l’empire, l’industrie linière existait en France et en Belgique, faisant des profits égaux dans les deux pays ; et, depuis cette époque, elle paraît y avoir marché du même pas. Nous ne parlerons point des fils et tissus de chanvre, industrie propre à la France, qui occupe une grande place dans la fabrication et qui défie toute rivalité. Pour les fils de lin, la concurrence de la Belgique n’est pas sérieuse. La filature à la mécanique, la seule qui ait de l’avenir, s’est introduite avec beaucoup de difficulté dans ce pays, où elle n’a donné d’abord que des produits inférieurs. Les toiles faites avec du fil, ainsi fabriquées[2], étaient exposées dans les marchés et n’y trouvaient pas d’acheteurs. Tout récemment cette industrie paraît s’être acclimatée. La chambre de commerce de Bordeaux avance, dans son mémoire, que la filature belge se composait, en 1841, de huit usines employant ensemble quarante-sept mille broches tournantes et qui se préparaient à augmenter leur matériel ; mais, jusqu’à présent, ces établissemens n’ont aucun avantage sur la filature française, et le fil que nous importons de Belgique est généralement fabriqué à la main. D’ailleurs, si nos filatures ont pu résister au choc des produits anglais, comme tout concourt à le prouver, celui des produits belges ne peut pas être très redoutable pour eux.

Dans le commerce qui se fait entre les deux nations, les toiles sont le principal moyen d’échange ; l’exportation des toiles belges n’a pas même d’autre débouché important que la France ; nous recevons plus des cinq sixièmes de ce que la Belgique produit en dehors de sa propre consommation. Voici le tableau de ce mouvement pendant les huit années, qui se sont écoulées de 1834 à 1842.

Toiles de fils. Exportation générale. Exportation pour la France.
1834. 31,496,932 26,773,228
1835. 44,641,624 30,379,337
1836. 38,268,742 31,252,376
  1. De l’Importation des fils et tissus de lin d’Angleterre.
  2. Enquête de 1840, déposition de M. Danneel.