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DE L’UNION COMMERCIALE.

deux pays. Cela dispenserait de soumettre la cour de cassation belge à la cour de cassation française. Quant au pouvoir qui doit accorder ou refuser l’autorisation de poursuivre les fonctionnaires, il n’y aurait aucun inconvénient à déléguer la commission mixte à la place du conseil d’état. On obtiendrait de la sorte l’unité de jurisprudence, sans porter atteinte à l’indépendance des juridictions.

Nous n’apercevons pas davantage la nécessité de déférer aux chambres françaises, en matière de tarifs et de traités de commerce, ce que l’on appelle le vote définitif. Aux termes de la constitution belge, comme selon la charte de 1830, toute convention internationale qui implique une question financière doit être soumise aux chambres sous forme de loi. Léopold, pas plus que Louis-Philippe, n’a le droit de renoncer, pour les représentans de la nation, à une prérogative qui est une partie essentielle de leur autorité et de leur responsabilité. À chaque modification de tarif, il faut donc que le parlement soit consulté. Le moyen de tourner la difficulté consiste à déléguer au pouvoir exécutif le droit, qu’il a déjà dans certaines limites chez nous, de modifier les tarifs par ordonnance en l’absence des chambres, sauf à les saisir de ces modifications dans leur plus prochaine session. Ce droit, la commission mixte l’exercera pleinement sous la responsabilité et avec la signature des deux cabinets. La nécessité et l’habitude apprendront ensuite au pouvoir parlementaire dans l’un et l’autre pays qu’il doit, en pareil cas, ne se considérer que comme une chambre d’enregistrement.

Quant à la question de savoir s’il y aura en Belgique une régie des douanes et une régie des tabacs distinctes de celles qui existent en France, nous pensons que l’intérêt des deux peuples s’accorde ici à conseiller l’unité d’adminiistration. Sans doute, à la rigueur, l’union commerciale serait compatible avec la division du travail administratif, et il suffirait, pour coordonner l’action des douanes en Belgique avec celle des douanes en France, d’une règle commune fortifiée par un contrôle vigilant ; mais le service ne pourrait manquer de souffrir et de perdre, dans les tiraillemens qui se feraient sentir d’un royaume à l’autre, l’énergie nécessaire au recouvrement complet d’un impôt qui doit produire 150 à 160 millions de francs. En outre, l’économie désirable dans les frais de perception et de surveillance dépend absolument de l’unité d’impulsion. Les états-majors nombreux sont la ruine de l’administration, qu’ils surchargent de dépenses inutiles, et dans laquelle ils introduisent, par le conflit de leurs prétentions, toutes les misères de l’anarchie.

Nous conseillons donc d’étendre le rayon d’opération de notre régie des tabacs jusqu’aux frontières de la Belgique, en réservant cependant au gouvernement belge la faculté de créer à Bruxelles, à Gand ou à Liége, une annexe de la manufacture française, un centre local de fabrication. On adopterait une combinaison semblable dans les douanes, pour lesquelles il n’y aurait qu’une seule direction générale, dont le siége serait à Paris. Les employés des douanes et des tabacs, belges ou français, seraient proposés pour la Belgique par la direction générale, dans chaque régie ; mais la nomination