Page:Revue des Deux Mondes - 1842 - tome 32.djvu/675

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
674
DE L’UNION COMMERCIALE.

et de saisie en dehors de la zone qui constitue le domaine des douaniers. Il faut considérer encore que le régime nouveau ne se présente pas comme une importation purement française, et que, les Belges devant en retirer le même bénéfice que nous, soit en revenu pour le trésor, soit en protection pour l’industrie, l’administration, loin de redouter leur hostilité, aura le droit de compter sur leur concours. On évoque mal à propos les souvenirs de l’empire. À une époque où les douanes n’étaient instituées que pour empêcher tout commerce extérieur, on conçoit que cette violence faite aux besoins et aux intérêts des populations ait soulevé leur résistance, et que la contrebande soit devenue une guerre organisée. Avec un tarif, dont la nature sera plutôt fiscale que politique, et qui aura pour principal objet de prélever un tribut, la part du trésor, sur chaque article de provenance étrangère, de pareils dangers ne sont nullement à prévoir. En tout cas, ce qui nous rassure, c’est la solidarité que l’union commerciale doit établir entre deux pays, qui n’auront plus qu’un seul et même intérêt.

L’association, constituée sur les bases que nous venons d’indiquer, serait déjà beaucoup plus étroite que celle des états qui forment l’union allemande et qui présentent pourtant une solide et redoutable agglomération. Que ceux qui la souhaiteraient plus entière laissent quelque chose à faire au temps. Entre les peuples comme entre les individus, les rapprochemens les plus durables sont ceux qui s’opèrent par degrés, avec la sanction de l’expérience et le ciment de la durée.

Lorsque l’union allemande s’est formée, le tarif des douanes prussiennes a été pris pour maximum des droits à établir dans le tarif de l’association. La Belgique est disposée à reconnaître que le tarif français doit servir de base au tarif qui sera adopté dans l’union commerciale des deux pays. Nous avons déjà fait pressentir, en divers endroits de ce travail, que cela ne nous paraissait juste et possible qu’à condition d’opérer dans notre système de douanes de larges et profonds remaniemens. La France ne peut pas raisonnablement enfermer la Belgique dans le cercle de ses prohibitions, ni recommencer en pleine paix la campagne chimérique du blocus continental. Comment garder sept ou huit cents lieues de frontières, si l’on donne une trop forte prime à la contrebande, soit en exagérant les droits de douane, soit en prohibant certaines provenances de l’étranger ? Comment ne pas soulever moralement l’Europe contre soi, et comment ne pas provoquer des représailles, si l’on fait d’une extension pacifique du commerce français une déclaration de guerre au commerce européen ?

L’association de la France avec la Belgique doit être l’occasion d’une révision générale de nos tarifs. Il faut les purger de toutes les prohibitions qu’ils contiennent, et poser en principe que les droits à écrire dans le tarif commun n’excéderont pas un maximum de 30 pour 100 ; mais nous ne demandons pas que cela se fasse gratuitement ni sans réciprocité de la part des autres peuples commerçans. Si la France sort enfin de l’ornière prohibitive, ses hommes d’état doivent s’efforcer de mettre cette révolution à profit pour ou-